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ONLY GOD FORGIVES

CONTRE : Niveau -1 - Abyssale vacuité

Ayant fui la justice américaine, Julian s’est exilé à Bangkok, en Thaïlande, où il tient un club de boxe avec son frère aîné Billy. Or celui-ci est assassiné après avoir sauvagement violé et tué une jeune prostituée. Débarquant des Etats-Unis pour identifier le corps, leur mère, folle de rage, exige de Julian qu’il venge son frère. Mais il faudra alors remonter à Chang, flic retraité aux méthodes pour le moins radicales…

Après avoir été adulé pour "Drive", lauréat deux ans plus tôt du prix de la mise en scène au festival de Cannes, Nicolas Winding Refn est revenu sur la Croisette avec un nouvel opus, attendu comme le messie. Ses atouts : la présence de l’homme du moment, Ryan Gosling, et la promesse d’un film à la fois violent et stylisé, qui marquerait une nouvelle progression dans la filmographie fascinante du réalisateur danois. Malheureusement le film déçoit, tant il illustre les limites du style refnien.

Assez proche de "Drive" dans sa facture formelle, "Only God Forgives" n’en a ni la puissance narrative, ni la charge émotionnelle. Accumulant les effets ampoulés de mise en scène (longs travellings asphyxiants, cadrages arty redondants) et reposant sur des personnages monolithiques (mention spéciale à Ryan Gosling), le film s’enlise dans une forme de léthargie esthétisante proche du vide. Les plans d’une impressionnante beauté se suivent et se ressemblent, ne constituant au final qu’une succession de tableaux un peu gratuits et dénués de valeur narrative. On n’évite ainsi pas les scènes inutiles étirées en longueur et passées au ralenti, habillage sonore vrombissant à l’appui, histoire de rendre follement sentencieux les faits les plus insignifiants.

Alors bien sûr, on ne peut reprocher à Refn de manquer d’ambition formelle. "Only God Forgives" est sans conteste un film d’ambiance, agrémenté de symboles œdipiens (dont une mémorable « ablation » du pouvoir de procréer) et empruntés à la culture japonaise (alors que nous sommes en Thaïlande, mais bon). Il est aussi porté par le culte de l’héroïsme, qui se traduit dans l’extrême violence qui ponctue le film (ici on tue au sabre, c’est plus classe) et dans l’énigmatisme des personnages : Julian le distant, Chang le samouraï sans foi ni loi, Crystal la mère vengeresse (Kristin Scott Thomas, étonnante de vulgarité). Mais en stylisant son film à l’extrême, Refn tue la tragédie grecque qui se noue et sombre dans une vanité qu’on ne lui connaissait pas, frisant par moments la caricature. Un film ovni, sans doute, mais que l’absence de propos et de richesses empêche d’ériger au rang des films rares. Espérons que tout cela ne soit qu’une mauvaise blague, et que l’intention initiale ne soit uniquement celle de provoquer.

Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur

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