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THE OLD DONKEY

Un film de Li Ruijun

Quand le désert avance

Ma Xingchun est un vieux paysan de la province de Gansu. Avec d’autres, il lutte pour ne pas se faire racheter ses terres par un entrepreneur sans scrupules. Sentant sa fin proche, le vieux monsieur retourne sur la tombe de ses parents et découvre que celle-ci est menacée d’être ensevelie par le désert. Il entreprend alors de planter des arbustes sur le flanc de la dune pour préserver les sépultures...

Les premières minutes de “Old donkey” sont déroutantes. Film de peu de moyen, l’image numérique rappelle les séries anglo-saxonnes des années 80. Une photo trop nette, à la lumière factice qui donne une ambiance peu naturelle à ce film tourné le plus souvent en extérieur. Le rythme lent et contemplatif, imposé par le réalisateur, s’attarde sur chaque action du vieil homme qui par définition n’est plus très rapide. En plan fixe on le voit haletant, bêcher la dune, et mettre un à un les fétus de paille dans le sable.

Voici une histoire simple, basée sur une problématique plutôt originale. Comment empêcher le désert d’ensevelir la tombe de ses aïeux, et ainsi conserver le bon emplacement Feng-Shui qui promet le bonheur de ses descendants. Le combat semble perdu d’avance, pourtant le vieux paysan s'attelle à cette entreprise impossible, histoire de pouvoir à son tour reposer en paix. Une à une il enchaîne les étapes du chantier, reconstruisant la nature là où elle n’est plus.

En parallèle, le réalisateur profite de cette jolie fable pour dénoncer la déchéance sociale de la région et la situation fort précaire des paysans du village. Tous très âgés, ils sont victimes d’une nouvelle réforme agraire qui les dépossède de leurs terres au profit d’un investisseur véreux. Isolés, ils ne bénéficient que de peu d’avantages et lorsque le vieil homme tombe gravement malade, sa fille doit l’emmener dans la nuit en moto, pour, une fois arrivés à l’hôpital, se faire refuser l’entrée faute de ne pas avoir assez d’argent. Symbole d'un communisme qui touche ici à ses limites, le pauvre vieillard pâtira de cette politique à deux vitesses. Ce sujet, malheureusement récurent dans le cinéma chinois “indépendant”, n’est pas des plus facile à aborder, et “Old donkey”, impose un ton glacial qui peut déconcerter, voire ennuyer.

Cependant à bien y regarder, le film brosse un attachant portrait du vieil homme. Il entretient une belle complicité avec sa fille. Pour exemple cette jolie scène où l’homme, exténué, demande à la jeune femme de rester dormir à ses côtés. Que ce soit sa fille, ou sa nièce, ce sont les femmes qui vont lui apporter tout le soutien dont il a besoin pour partir sereinement. Le réalisateur ne s’éparpille pas et fait passer tous ses messages en gardant un œil humain sur son héros. En résulte un film certes difficile d’accès, mais assez attachant si on se laisse porter.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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