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MUSIC

Un film de Angela Schanelec

Les choses de la vie, dans un film… sans vie

Dans la pénombre, un homme porte une femme, morte, en sanglotant. Au petit matin, la police et une ambulance arrivent devant une bergerie où se tient un homme, le t-shirt plein de sang. Un bébé est alors recueilli. Plus tard, Jon, une vingtaine d’années, et ses amis, en voiture sur un chemin de la côte grecque, ont un problème de roue. Alors que les autres filent vers la plage, laissé à la traîne à cause de ses blessures aux pieds, il tombe sur une autre voiture, dans laquelle un homme l’emmène derrière les rochers et tente de l’embrasser. Le rejetant violemment, il lui fracasse la tête sur un rocher et se retrouve condamné à un an de prison. Là, une gardienne se prend de compassion pour lui…

Music (2023) film movie

Avant d’aller voir "Music", récent prix du meilleur scénario au Festival de Berlin, et film qui divise fortement, il vaut mieux s’être renseigné. Car même en ayant lu le synopsis, ou le mythe d’Oedipe, dont il est très très très très très très très très librement adapté, il sera bien difficile de rassembler les morceaux, et de faire le lien entre les personnages. Il vous faudra déjà deviner que le bébé recueilli n’est autre que Jon, le jeune homme que l’on retrouvera après deux ellipses. Ne cherchez pas ici de parricide ou d’inceste avec la mère, vous n’en trouverez pas non plus. Et si Angela Schanelec aime à raconter ses histoires par ellipses, comme dans l’intéressant "J’étais à la maison, mais…", qui charriait un certain mystère, ceci frôle ici la caricature.

En effet dans "Music", tout n’est que pose et absence de réaction face aux hasards et aux coups du destin (qui s’avèrent nombreux). Peu de dialogues quand on n’a pas droit au silence, et des interprètes qui n’ont tellement rien à jouer en termes d’émotions qu’il est bien difficile de dire s’ils font leur métier correctement. Tous les liens entre les personnages sont alors factices, et rapidement le ridicule vient submerger le tout, comme dans la scène du coup de fil, où Agathe Bonitzer, apprenant le décès d’un proche, a pour seul dialogue d’une vacuité abyssale : « Dis-m’en plus ». Caricature de film d’auteur, pourtant maîtrisé formellement, "Music" s’achève lui-même avec une scène d’illumination dans laquelle Aliocha Schneider nous offre un grand moment comique. Restent un sens indéniable du cadrage et de la disposition des corps, ainsi qu’une superbe affiche. Mais pour le destin, les hasards et autres fatalités de l’existence, on préférera revoir des films où les auteurs prennent la peine de rendre leurs personnages vivants : "Les Choses de la Vie", "Retour à Howards End", "Mr Nobody", "Eternal Sunshine of the Spotless Mind", "Reviens-moi", et tant d’autres...

PS : que ceux qui auront compris en sortant de la séance, comme l’indique le synopsis officiel, que le personnage devient progressivement aveugle… lèvent le doigt !

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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