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MON INSÉPARABLE

Un film de Anne-Sophie Bailly

Laure Calamy au firmament des mères courage

Mona est une mère dont l’attention est accaparée par son fils, considéré comme différent et peu éveillé. Habituée à tout organiser et anticiper, elle découvre que Joël a non seulement une petite amie, Océane, dans l’établissement où il travaille (un ESAT), mais que celle-ci est enceinte…

Depuis "Antoinette dans les Cévennes", en quelques films dont elle a tenu le rôle principal, Laure Calamy s'est imposée comme une actrice incontournable, capable d'incarner un mélange de fragilité, de révolte et de fougue obstinée, dans un équilibre chaque fois renouvelé. Ayant déjà incarné des rôles de mère-courage, dans "Annie Colère" où elle intégrait une association pro-avortement, mais aussi dans "À plein temps" et "Une femme du monde" où la question de l'argent était au cœur des préoccupations (pour survivre dans l'un, pour payer des études à son fils dans l'autre...), voici qu'elle endosse à nouveau ce rôle, sous un autre prisme : celui du cordon à couper. Car comme son titre l'indique, "Mon Inséparable" (en référence aux célèbres couples d'oiseaux), son personnage, Mona, vit ici une relation fusionnelle et complice avec son fils, Joël, jeune adulte handicapé, dit « en retard intellectuellement », dont elle découvre la fiancée, employée comme lui d'une ESAT (entreprise sociale d'Etat).

Si son fils va devoir gagner en autonomie, c’est logiquement elle aussi qui va devoir le laisser prendre ses responsabilités et mettre quelque peu ses inquiétudes (naturellement amplifiées par le handicap) en sourdine, alors que celui-ci exprime le souhait de garder l’enfant à venir. Passé par la section Orizzonti du Festival de Venise, le film fait ainsi le portrait d’une mère, dont l’existence a jusqu’ici été dédiée entièrement à son fils, et qui, bousculée par les certitudes de celui-ci, va tenter de s’octroyer le droit de vivre un peu pour elle-même et se révolter face aux réactions ceux qui la jugent. Récit de deux émancipations parallèles, passant forcément par une certaine douleur, "Mon Inséparable" a le mérite également d’avoir donné le rôle du jeune couple, Joël et Océane, à deux acteur et actrice, eux-mêmes en situation de handicap (Charles Peccia-Galletto et Julie Froger), offrant ici encore plus de résonance à leurs revendications de jeunes adultes se rêvant un avenir autonome.

Abordant ainsi les limites de la capacité à se mettre à la place des autres, la réalisatrice-scénariste met face à eux et leur apparente ingratitude, un personnage de femme victime à sa manière du regard et des a priori des autres, qui peut progressivement laisser s’exprimer autre chose que ses peurs, qu’il s’agisse de désirs réprimés, de pensées politiquement incorrectes, ou de légitimes interrogations. Laure Calamy excelle une nouvelle fois dans ce rôle hautement explosif, coincé entre une mère en maison de repos, un mari qui a refait sa vie, et un fils avec lequel le conflit couve, nous offrant trois scènes mémorables, particulièrement fortes en émotion. Un film rude mais bourré de tendresse et tourné vers une nécessaire attention à soi, autant qu’à l’autre.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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