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MICKEY 17

Un film de Bong Joon-ho

Un film de SF résolument politique

2054. Un vaisseau arrive, après presque quatre ans et demi de voyage, sur une place glacée. Parmi l’équipe figure un volontaire, Mickey Barnes, qui a accepté que l’on le duplique à chaque fois qu’il meurt. C’est ainsi que ses 16 premières sont envoyées sur la planète, permettant au final de fabriquer un vaccin contre un virus aérien. Mais même si sa 17e version a survécu au virus, elle tombe dans une crevasse et est laissée pour morte par l’un des membres de l’équipage au fond. C’est alors que d’étranges créatures s’approchent de lui…

En adaptant le roman "Mickey7" d'Edward Ashton (2022), le réalisateur coréen Bong Joon-Ho revient derrière la caméra, 5 ans après sa palme d'or et l'Oscar du meilleur film de "Parasite". Il revient aussi à un registre qui avait divisé le concernant, le film de science-fiction voire d’anticipation, comme ont pu l’être "Transperceneige" et dans une moindre mesure "Okja" (sorti finalement directement sur Netflix). Parions que si l’on trouve ce nouveau film très attendu, passé par le hors compétition de la Berlinale, très réussi, il ne manquera pas de diviser, du fait de son caractère bavard et philosophique (ce qui impose à l’action un rythme ralenti) et par son humour, carrément noir.

C’est donc en 2054 que prend place l’intrigue concernant ce personnage, Mickey n°17 (soit la 17ème version de Mickey Barnes) le spectateur adoptant tout de suite le point de celui-ci grâce à une voix-off (celle de Robert Pattinson donc, qui l’incarne avec ce mélange de naïveté et d’instinct de survie irrationnel), au fond d’une crevasse où le personnage survivra, chahuté et emmené vers la surface par des créatures étranges entre le ver géant et mille-pattes. La première partie du film est sans doute la plus amusante, portée par un humour noir autant verbal que visuel, Mickey servant de fil rouge pour expliquer comment il s’est retrouvé à accepter un tel rôle, d’humain tuable à merci et réimprimable, mais aussi la manière dont fonctionne sa résurrection. Les spectateurs s’amuseront alors de la manière dont on se débarrasse du corps, le réplique ou s’en sert comme d’un sujet d’expériences diverses, voire de moqueries.

Ironisant régulièrement sur sa propre situation, Mickey va alors pouvoir revenir au vaisseau et devenir avec son double, l’un des acteurs clés d’une colonisation qui peut ou non respecter l’état et la vie sur la planète convoitée. C’est ainsi un discours de fond sur le caractère prédateur de l’être humain et sa propension aux conflits qui dominera une deuxième partie plus orientée vers l’action. Épinglant également au passage l’inclinaison des plus riches à utiliser les autres comme rats de laboratoires ou comme chair à canon, le scénario apparaît on ne peut plus d’actualité, expliquant peut-être là pourquoi la Warner a repoussé la sortie du film après les élections américaines. Ceci d’autant plus que Marc Ruffalo (qui interprète ici le sénateur qui a réussi à obtenir une exception pour exploiter, dans la colonisation d’une nouvelle planète, la réplication des êtres humains, interdite sur terre) est affublé d’une prothèse dentaire et de tics qui ne sont pas sans rappeler un certain président.

Riche des mémoires des exemplaires qui l’ont précédé, le personnage de Mickey s’oppose ainsi symboliquement à ceux qui dirigent le vaisseau, incapables de tirer des leçons du passé, et reproduisant l’attitude des dictateurs qui l’ont jalonné. Si par moments le film donne dans la caricature dans la représentation de certains personnages (la femme du sénateur notamment, interprétée par une Toni Colette un peu trop ouvertement sans scrupules...), le film n’en reste pas moins spectaculaire, créant une ambiance futuriste très réussie, grâce à des effets spéciaux et des créatures dont la multitude ne peut que générer l’inquiétude. Aucun doute que ce blockbuster aux élans politiques lisibles, tombe à pic au moment où justement la démocratie américaine est en train de vaciller.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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