LES BRAISES

Un film de Thomas Kruithof

À trop taper sur les mêmes…

Synopsis du film

À Dompierre vivent Karine et Jimmy, jeunes quarantenaires, avec leurs deux enfants, Enzo 17 ans et Anaïs 15 ans, dans une maison encore en travaux. Alors que lui tente de maintenir à flot sa petite entreprise de chauffeurs routiers, elle, soumise à des cadences infernales dans son usine de conditionnement alimentaire, surveille ce qui se passe sur les réseaux sociaux en réaction à l’augmentation du prix du gasoil. Elle compte bien d’ailleurs aller manifester le samedi suivant. Revêtant son gilet jaune à l’approche du lieu de rendez-vous, elle se retrouve surprise par l’ampleur du mouvement et l’esprit d’entraide qui y règne…

Critique du film LES BRAISES

"Les Braises" est sans doute la première fiction débarquant dans les salles et ayant pour sujet principal le mouvement des gilets jaunes. En résulte un film brûlant et tendu qui pose les bonnes questions, tout en suggérant les conséquences d’une tendance à toujours taper sur les mêmes, ceux qui ne savent désormais plus comment lutter, entre tentation de générer la peur par la masse et la violence, et système policier et judiciaire qui réprime même par anticipation. La dénonciation du piège qui s’est refermé sur ceux qui étaient dotés de bonnes intentions est sans faille, au travers d'un scenario qui manie le sentiment d’injustice et construit son suspense sur la division tant espérée (ici au sein même d'un couple) par un pouvoir qui ne sait plus ce que « justice sociale » signifie et qui a progressivement donné toutes les armes à une extrême droite forcément renforcée par le mépris et la répression tous azimuts. Portant parfaitement son titre, "Les Braises" se répandent au final, comme une nouvelle traînée de poudre laissée derrière un incendie...

À l’intelligence d’un scénario qui expose donc l’opposition entre deux points de vue, au travers des deux membres du couple, soulignant l’exploitation des « petits », s’ajoute l’intelligence de la mise en scène signée Thomas Kruithof (l'excellent "Les Promesses"). L’installation, presque silencieuse, se fait en quelques plans, montrant le couple faisant des travaux, dînant avec ses deux enfants, puis faisant l’amour dans le camion du mari. Ceci avant que l’on ne pénètre dans le milieu professionnel de l’une (cadences infernales, impossibilité de discuter avec la hiérarchie…), puis, plus tard de l’autre (responsabilité truquée, chantage aux contrats...). Entre temps, un face à face avec la police à un rond point aura eu vite fait de rajouter à une blessure physique, une humiliation malvenue, renforçant une conviction au lieu d’en éteindre l’étincelle. Le duo formé par Virginie Efira et Arieh Worthalter ("Le Procès Goldman", "Comme le feu") est tout juste percutant, dans sa complicité mise à mal, comme dans sa capacité à dialoguer jusqu'au pied du mur. Pivots de ce film haletant qui donne forcément à réfléchir, ils incarnent un bouillonnement qui ne cesse de grandir, malgré les claques.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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