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LA VOIX HUMAINE

Un film de Pedro Almodóvar

Oscillations d’humeur face à l’abandon

Une femme s’interroge sur l’absence d’un homme, sensé venir les chercher elle et son chien. Après quatre ans de bonheur avec lui, elle est sans nouvelles depuis trois jours. Jusqu’au coup de téléphone tant attendu ou redouté…

La Voix humaine film court métrage short movie

Très librement adapté de la pièce éponyme en un acte signée Jean Cocteau (1930), le nouveau film de Pedro Almodóvar est un moyen métrage de 30 minutes, passé par la Mostra de Venise et sortant finalement directement en DVD et VOD, agrémenté d’un documentaire sur le tournage. Pour un texte initial de près d’une heure, l’adaptation propose avant tout un monologue en voix-off et une longue conversation téléphonique en forme d’adieux, d’une durée d’environ dix minutes. Si le matériel original lui aurait aussi inspiré son long métrage "Femmes au bord de la crise de nerf", Almodóvar travaille ici avant tout la forme et la symbolique.

Offrant au passage un rôle poignant à la formidable Tilda Swinton, véritable boule de nerfs désarçonnée par l’absence de son compagnon, et affublée d’un chien ressentant lui aussi ce qui ressemble à un abandon, il ouvre la porte à l’expression des envies de meurtres de la belle. Après l’évocation d’un monde déserté, au travers des décors d’une usine désaffectée, la belle va d’ailleurs, dès les premières scènes, acheter une hache dans un magasin d’outils. Développant à cette occasion un des plus beaux génériques de l’histoire du cinéma, de multiples outils venant écrire par leurs formes et agencements les noms de la maison de production, du réalisateur et de l’actrice, ainsi que le titre du film.

Le reste se passera principalement dans un décor de cinéma dont l’héroïne parcoure les contours et explore toutes les limites, comme pour mieux signifier le vide qui entoure désormais cette femme poussée à bout, mais oscillant de plus en plus violemment entre décence et rage. La direction artistique du métrage, comme le travail sur les costumes, sont tout juste remarquable, les couleurs vives dominant la grisaille qui entoure le personnage, depuis les tenues monochromes de cette femme (robe rouge satinée, pull à col roulé orange, tenue bleu avec sac rectangulaire noir…) jusque dans l’harmonie du cocktail de pilules qu’elle serait tentée d’avaler. Elles magnifient ce court métrage en forme de parcours thérapeutique surréaliste, entre sidération, désespoir, survie et révolte, qui se termine sur un légitime boléro. Entre la peur et la volonté de blesser il n’y a finalement peut-être qu’un pas.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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