LA DISPARITION DE JOSEF MENGELE
L’exil sud-américain du « boucher d’Auschwitz »
Synopsis du film
Josef Mengele, médecin nazi du camp d’Auschwitz, parvient à fuir en Amérique latine après la défaite du IIIe Reich. Entre l’Argentine, le Paraguay et le Brésil, il échappe pendant près de 40 ans aux mandats d’arrêt émis à son nom pour crime de guerre…

Critique du film LA DISPARITION DE JOSEF MENGELE
L'ouverture édifiante du nouveau film de Kirill Serebrennikov ("Leto", "La Femme de Tchaïkovski") nous montre des étudiants en médecine brésiliens analyser un squelette présenté comme étant celui de Josef Mengele, tristement célèbre sous le nom de « boucher d'Auschwitz ». Et le professeur d’énoncer à ses élèves d'un ton sentencieux que pour connaître l'homme, il faut étudier son squelette. Vraiment ? De toute évidence on ne peut pas résumer Mengele (ou n'importe qui d'autre) à l'écartement de ses incisives supérieures ou aux séquelles qu'a laissé un accident de moto. C'est bien sûr en explorant sa psyché que nous parviendrons à cerner le personnage. Et c'est ce qu'entreprend le cinéaste russe.
En se concentrant sur la seconde partie de sa vie, après 1945, Kirill Serebrennikov dresse le portrait d'un homme défait, humilié dans ses convictions, et qui en réponse radicalise encore davantage sa pensée déjà extrémiste. August Diehl ("Inglourious Basterds", "Une Vie Cachée") campe à la perfection cet homme aigri vociférant des insanités sur l’humanité entière, faisant ainsi la preuve de toute l’amplitude de son talent, d’autant qu’il incarne son personnage sur près de 40 ans de sa vie, avec toutes les transformations physiques que cela implique.
Ce qui frappe surtout dans la personnalité de Mengele c'est son obstination à rester opaque aux faits et aux arguments rationnels. Un aveuglement qui peut rappeler certains leaders politiques contemporains. De là à ce que Mengele crie à la « fake news » lorsqu'on lui dit que la RFA de Conrad Adenauer s'en sort bien mieux que le Reich d'Adolf Hitler il n'y avait qu'un pas. Et comme on pourrait s'y attendre, le protagoniste ne montre aucun remord pour ses crimes, se contentant, comme les principaux accusés des procès de Nuremberg, de se demander pourquoi l'opinion publique s'acharne sur lui alors qu'il y a tant d'autres hommes coupables de crimes similaires.
De ces crimes à proprement parler il n'est que peu question. On imagine que trop bien quel genre d'expérimentation et de traitement ce médecin, affublé du doux sobriquet de « boucher d’Auschwitz » ou encore « ange de la mort », pouvait réserver à ses patients. Kirill Serebrennikov raconte davantage l'histoire d'un homme incapable d'ouvrir les yeux que celle d'un tortionnaire. Une vraie leçon d'Histoire et une leçon bienvenue en ces temps d'irrationalité.
Benjamin BidoletEnvoyer un message au rédacteur