LA CHUTE DU CIEL
Une œuvre engagée qui préfère l’épure à la démagogie
Une tribu indigène de l’Amazonie brésilienne se bat tous les jours pour préserver son territoire et ses traditions…

Une caméra fixe. Les ondes d’une chaleur qui semble étouffante. La lisière de la forêt. Puis une tribu qui marche, doucement, revenant de la chasse. À l’image de ce plan qui s’étire sur plusieurs minutes, le documentaire d’Eryk Rocha et Gabriela Carneiro da Cunha se refusera toujours aux artifices, aux effets de mise-en-scène. Non, le film se veut être un témoin d’un mode de vie sans jamais forcer les protagonistes au moindre écart de leur quotidien. Bercé par le discours puissant d’un chaman, devenu porte-parole de sa communauté, le métrage est une plongée totale dans une culture et une cosmologie dont la plupart d’entre nous ne connaissent rien. D’ailleurs, leur mode de vie d’apparence anachronique pourrait d’abord prêter à sourire. Mais c’est bien l’émotion qui nous guette très rapidement, face à une leçon de vie aussi pure que profonde.
Dans cette œuvre remarquée à la Quinzaine des Cinéastes, il n’est pas question de grand pamphlet politique ou écologique. Les images balayent tous les mots superflus. Leur lutte contre le « peuple de la marchandise », contre ces machines qui viennent menacer leur environnement et l’Amazonie brésilienne dans son ensemble, est évidente, sincère et inspirante. À chaque séquence capturée, "La Chute du ciel" déborde d’une authenticité qui évite au projet de basculer dans le regard nauséabond du colon blanc qui observerait ces us et coutumes comme un spectacle. Onirique et mystique, le film rend, au contraire, un vibrant hommage à un groupe d’indigènes dont le rapport à la nature est différent du nôtre. L’objectif est à l’opposé de la vulgaire comparaison de nos croyances et de notre appréhension du monde, mais vise simplement à faire vivre aux spectateurs une expérience immersive comme seul le cinéma peut produire. Et si ces quasi deux heures passées dans ces contrées lointaines amènent le public à s’interroger sur son propre lien avec les éléments qui l’entourent, le visionnage n’en devient que plus nécessaire.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur