L'ESPION DE DIEU
Le résistant séminariste
Dans les années 30, Dietrich Bonhoeffer part étudier la théologie aux États-Unis. Il y découvre une société clivée et en proie à la haine raciale. De retour dans son Allemagne natale il entreprend de devenir pasteur pour prêcher la tolérance, mais se heurte à la montée du nazisme et sa branche religieuse : l’église du troisième reich. Il décide de rester fidèle à ses convictions et de résister…

La Seconde Guerre Mondiale, et en particulier la lutte contre l’Allemagne nazie, est un sujet vu et revu au cinéma, et qui ne semble pas se démoder depuis près de 80 ans. Comment faire pour y apporter quelques nouveautés ? Aborder le sujet sous le prisme de l’opposition religieuse est une bonne option. Il est vrai que peu de cinéastes se sont aventurés sur ce terrain. Citons tout de même le peu connu mais excellent "La pourpre et le noir" réalisé par Jerry London en 1985, ou plus proche de nous "Amen" de Costa-Gavras. De même, le thème de la résistance allemande face au nazisme est relativement rare. Encore une fois on peut trouver un certain nombre de contre-exemple, notamment "Walkyrie" qui relate l’un des principaux complots visant à assassiner Hitler.
"L’Espion de Dieu" a le mérite de mettre en scène un Allemand tout ce qu’il y’a de plus allemand, pasteur de son état, qui s’oppose farouchement au parti aryen au nom de ses convictions religieuses. Faisant de ce personnage, si ce n’est une complète nouveauté, du moins un personnage original. Qui plus est, interprété par un Jonas Dassler convainquant, qui fait donc figure d’exception dans un casting qui à la fâcheuse tendance à jouer faux, exception faite des acteurs plus chevronnés que sont August Diehl ("Inglourious basterds", "Une vie cachée") et Moritz Bleibtrau ("Soul kitchen", "Munich").
On peut également pointer du doigt une narration qui se perd dans différentes temporalités et une mise en scène parfois grandiloquente pour pas grand-chose. Mais le principal défaut réside dans l’absence d’antagoniste clair. Quelqu’un qui puisse représenter le point de vue opposé à celui du héros. Car de fait, une grande partie du clergé allemand s’est convertie à la nouvelle foi nazie. La figure de Ludwig Müller, premier évêque du Reich, est rapidement évoquée. Pour un film qui prétend traiter des convictions, tant religieuses que politiques, et à quel point celles-ci peuvent s’entremêler, le point de vue adopté est assez décevant.
Pour autant il est important de montrer que la foi, et en l’occurrence la foi chrétienne, ne peut que conduire au rejet de toute forme de discrimination ou de haine. Comme souvent, "L’Espion de Dieu" se révèle être un film habité par les meilleures intentions du monde, mais perclus de défaut.
Benjamin BidoletEnvoyer un message au rédacteur