KNEECAP

Un film de Rich Peppiatt

Le stimulant mariage du politique et de la chanson

À Belfast, en Irlande du Nord pour les brits, ou dans le Nord de l’Irlande pour les indépendantistes, Liam se fait arrêter lors d’une soirée et refuse de parler anglais à la police. Un professeur de musique parlant le gaélique est alors appelé pour faire la traduction. Celui-ci l’aide à sortir en revendiquant son droit à sa langue et récupère au passage le carnet dans lequel celui-ci a noté des paroles de chansons. Il l’aide alors Liam et son pote Naoise à donner vie à des morceaux de hip hop, dans son garage qui sert de studio. Liam décide de nommer leur groupe Kneecap et tous les trois se produisent dans un pub local, mais sous drogue…

Précédé d’une excellente rumeur depuis plusieurs mois, le film irlandais "Kneecap" (Flèche de Cristal au Festival des Arcs 2024, meilleure première œuvre aux Baftas...) débarque enfin sur nos écrans hexagonaux quelques jours avant la fête du cinéma. Un pari potentiellement gagnant pour son distributeur, le film pouvant toucher un large public, des ados ou jeunes adultes fans ou non de hip hop à un public plus âgé sensible au discours de fond teinté de politique et de linguistique. Car l’un des thèmes principaux du film, derrière les caractères de troublions de ses deux grands ados de compositeurs en herbe, et du professeur de musique qui cherche désespérément à rester anonyme (il revêt une cagoule aux couleurs du drapeau irlandais pour chaque concert), est le droit à langue gaélique, que seulement 6000 personnes parlent encore en Irlande du Nord (ou au Nord de l’Irlande, selon si l’on se sent britannique ou non). Le politique s’invite donc joyeusement dans un récit où la drogue est aussi un élément clé, le scénario dénonçant l’hypocrisie généralisée autour du sujet, entre défenseurs publics de la morale et factions prétendument anti drogue, pour la protection des petits, mais aussi violentes et intéressées que n’importe quel gang.

Avec malice, la mise en scène met à distance cette violence dans laquelle semblent avoir baigné les deux gars (un tabassage en règles est ainsi montré en accéléré, voix-off en plus). Car en effet, le film est part tellement raconté par l’un des personnages, Liam, en voix-off avec un mélange d'une certaine désinvolture et d'un humour cinglant. Face aux deux jeunes interprètes aussi vitaminés que le montage et l’intrigue, Michael Fassbender incarne la vieille garde ayant tout sacrifié à la cause (ici le père de Naoise), et que certains voudraient bien oublier. Véritable tourbillon de fraîcheur et d’humour, explosant les codes du film d’accomplissement par la musique, "Kneecap" (référence aux genoux brisés lors d’exactions de l’IRA…) pourrait bien être l’un des succès surprises de ce début d’été.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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