JULES AU PAYS D'ASHA
Le sort des populations autochtones, vu à hauteur d’enfant
1940. Jules, dont le père est décédé, arrive avec sa mère dans la maison de son oncle, maire d’un village reculé de colons situé au Nord du Québec. Mis à l’écart des autres enfants à cause d’une maladie de peau qui l’oblige à porter des gants sur la totalité de ses avant bras, Jules, parti chercher en forêt son chien noir Flagrant, fait la connaissance d’une jeune autochtone prénommée Asha. Les deux parents de celle-ci ayant disparu, Jules décide de l’accompagner jusqu’à une réserve indienne qu’il a vu sur un plan dans le bureau de son oncle…
Avec sa belle affiche, "Jules au Pays d'Asha" évoque immédiatement l'amitié en un garçon blanc et une fillette autochtone, tous deux étant protégés par une forêt luxuriante, offrant une fenêtre sur une vallée dont on ne sait trop si elle sera synonyme d'aventures ou de dangers. Au travers de ce qui est clairement un film pour enfants, Sophie Farkas Bolla tente d'aborder la situation difficile des peuples autochtones (ou Premières Nations) au travers du parallèle entre le destin de Jules, garçon atteint d'une maladie de peau très rare, et d'Asha, jeune fille autochtone, laissée à elle-même en forêt. Tous deux exclus de la société (il est rapidement isolé par son oncle, sous prétexte sanitaire, et cantonné à sa chambre dans le grenier, elle est victime de racisme et du mépris des colons, comme les autres membres de son peuple), tous deux sont séparés de leurs parents (il a perdu son père et se retrouve sous la coupe d'un oncle tyrannique, elle ne sait pas où son ses parents), ils vont unir leurs forces dans une amitié naissante.
Bien entendu certains aspects de l'intrigue semblent un peu condensés, comme la méfiance initiale de Jules face à Asha, rapidement balayée pour faire place à la curiosité, mais l'autrice parvient rapidement à rendre palpable une certaine fascination pour la forêt. Celle-ci est en effet magnifiée par la photographie, dans les couleurs de sa mousse, ses champignons ou ses fleurs, rendues ici presque irréelles. Elle parvient de plus à suggérer le côté presque surnaturel (et finalement spirituel) du rapport d'Asha à la nature (le vent comme son souffle ont de l'importance à chacune de ses apparitions), afin de nous amener progressivement vers la conclusion. Avec en toile de fond l'histoire d'une des Premières Nations, chassées de leurs territoires par des hommes blancs avides de ressources (la scène de traversée de tout un pan de forêt abattu, a quelque chose de graphiquement glaçant), et cantonnés à des réserves délimitées sur une carte, le film parvient à son but : sensibiliser les plus jeune à la fois à l'exclusion, à la surexploitation de la forêt et au traitement des autochtones. Un petit film d’aventure à hauteur d’enfants, qui rappelle qu’ « on appartient à la terre », et pas l’inverse.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur