ISLANDS

Un film de Jan-Ole Gerster

Sam Riley dans un efficace polar ensoleillé

Tom est professeur de tennis dans un hôtel sur une île des Canaries. Si son emploi du temps est plein dès 9 heures du matin, il ne peut s’empêcher de sortir chaque soir en boîte de nuit et de s’alcooliser, se réveillant parfois en des lieux incongrus. Un jour, un couple britannique lui demande de prendre leur fils Anton pour des cours particuliers. Celui-ci accepte de mobiliser l’horaire prévu pour un couple de français qui ne se présente jamais. Voyant que le père, Dave, n’est pas content de leur chambre, il se débrouille pour leur obtenir une suite rarement occupée. En remerciement, ceux-ci l’invitent à un dîner, lors duquel ils sympathisent. Tom accepte alors de leur servir de guide sur l’Ile…

C’est la tête dans le sable, au milieu des dunes, que l’on découvre le personnage de Tom, incarné par Sam Riley ("Le Jeu de la reine", "Control"), alors qu’il se réveille et rejoint son quatre quatre. En bord de cadre on aperçoit un hôtel, au loin, sans doute le lieu où il travaille. Quelques scènes suffisent à représenter la superficialité de sa vie, routine faite de cours de tennis qu’il donne au club de l'hôtel et de soirées plus qu’arrosées d’où la drogue n’est pas absente, où il drague de jolies touristes et finit souvent alcoolisé dans des lieux inappropriés (un transat au bord de la piscine, le lit d’une inconnue…).

Virant soudainement au thriller, alors que le mari a disparu et que l’attirance entre Tom et la femme de celui-ci se fait de plus en plus évidente, le film, découvert à la Berlinale Special, a récemment remporté le Grand prix au Festival Reims Polar. Étonnant par son ambiance ensoleillée et caniculaire, loin des codes des polars poisseux ou nocturnes, "Islands" est à la fois vecteur de dépaysement et porteur d’une tension allant crescendo, le scénario lançant derrière le tandem professeur / femme une police fatiguée des comportements des touristes et peu habituée à de véritables disparitions. Ajoutant comme ingrédient la dégradation de l’entente du couple, comme les regrets d’une vie de célibataire pour le mari, le récit, plutôt malin, égraine des indices qui augmentent le trouble au fil du récit.

Derrière la romance ambivalente et l’intrigue policière, "Islands" est surtout le portrait d’un homme seul, enfermé dans une logique d’éternel célibat, se cachant derrière une routine de fiesta mortifère, et que la rencontre avec ce couple dysfonctionnel va sortir de sa sorte d’adolescence prolongée. Un peu cruel sur la fin, le film est un conte moderne ensoleillé sur certaines illusions et hésitations masculines, que le personnage de Sam Riley incarne jusque dans les derniers instants, incapable de franchir le pas vers quelque chose de stable (la ferme à dromadaires de ses amis locaux repartant au Maroc, la femme d’un autre…). Il recèle de plus quelques plans qui marqueront la rétine, dans ces îles Canaries à la fois familières et si lointaines.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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