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IN THE FAMILY

Un film de Patrick Wang

Le plus beau des combats

Cody et Joey vivent ensemble depuis de nombreuses années et élèvent Chip, le fils de Cody et de son ancienne femme, prématurément décédée. Le bel équilibre de la famille est brisé le jour où Cody est victime d’un accident de la route et que la famille de Joey veut avoir la garde du petit Chip…

Difficile de ne pas craquer pour ce film qui élève la raison face à l’égarement, pour ne pas dire la bêtise, ou comment au sein d’une famille, on peut en venir à se déchirer inutilement sur la base d'a priori ou d'aveuglements. Dans un conflit familial, les papiers administratifs officiels comme les injonctions d’un avocat peuvent aisément ombrager le plus important : les vrais sentiments. Patrick Wang – scénariste, réalisateur et acteur – a voulu montrer comment un drame peut en entraîner un second au cœur même d’une famille des plus unies. Certes, il s'agit ici d'une famille pas comme les autres, avec un couple d’hommes qui élève l’enfant de l’un d’entre eux, prématurément veuf. Mais une famille qui fait fi de cela, où tout se passe au mieux dans le meilleur des mondes, et au centre de laquelle Chip, un petit gamin de 6 ans qui n’a jamais connu sa mère, est incroyablement doué et mâture pour son âge.

Quand l’accident sonne le glas de ce cercle heureux, on ne peut pas imaginer ce qui va suivre, on ne comprend pas réellement les motivations de la belle-famille. Qui tire les rênes ? Dans quel but ? Financier ? Homophobe ? La question « Est-ce que la famille aurait réagi de la même manière si Joey avait été une femme ? » est légitime. Rien ne dit dans le film que la raison de cette querelle est liée au fait que le couple soit gay. On peut imaginer, en effet, que plus l’attachement au noyau familial est fort, moins on prend raisonnablement les bonnes décisions. Le premier motif de la sœur de Cody est le respect des dernières volontés de son frère. En même temps la scène dans l’hôpital au début du film est saisissante de vérité. Quand l’infirmière refuse l’accès de la chambre à Joey, personne dans la famille de Cody ne s’oppose à cette lamentable réaction. Il faudra le combat de Joey, intelligemment conduit par son avocat, pour faire exploser la profondeur des sentiments et faire que la raison l’emporte.

Patrick Wang découpe son film en trois parties d’une heure environ chacune, dont une première dominée par l’excellent Sebastian Banes dans le rôle du jeune Chip et une deuxième un peu longuette, mais les 2 h 45 sont parfaitement bien maîtrisées. On pense à "Boyhood" de temps en temps en se disant qu’il ausculte de la même manière que Richard Linklater l’évolution des sentiments au sein d’une famille, sur une longueur de film certes identique mais une période de vie complètement différente. Wang et Linklater pourraient d’ailleurs être classés dans le même registre de cinéma indépendant, tels des chercheurs de la nature humaine excluant tout misérabilisme et effets larmoyants inutiles. Il est fort à parier que l'auteur d' « In the family », dont c’est le premier long-métrage, connaîtra le même succès que le second.

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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