GHOSTLIGHT
Penser et panser grâce au théâtre
Dan, Sharon et leur fille Daisy font face à des crises personnelles ou familiales après un drame. Par hasard, Dan rencontre une troupe de théâtre amateur qui va lui permettre de voir les choses autrement…

Parfois, la force puise sa source dans la faiblesse. Dans "Ghostlight", c’est à la fois vrai pour les personnages et pour le film lui-même. Côté protagonistes, c’est assez évident : le drame qu’ils vivent et leurs difficultés connexes les contraignent à chercher la lumière autrement. Pour ce qui est du film, il peut sembler un peu fastidieux ou confus au départ, car on ne sait pas vraiment ce que traversent les personnages ou ce qui les meut (tant la famille que la comédienne de théâtre que rencontre Dan) et notre empathie peut être bloquée pendant un temps. En fait, cette impression d’imperfection est une illusion, car elle est due au choix délibéré de dévoiler l’histoire des protagonistes par petites touches. Derrière l’apparent brouillard, la lumière se fait donc progressivement pour le public.
Et cela tombe bien, car la lumière est un concept central du film : une ghostlight, ou servante en français, c’est une petite lampe qui reste allumée quand tout un théâtre est plongé dans l’obscurité. Une sorte de veilleuse qui continue d’éclairer quand plus rien ne semble vivre. Un symbole d’espoir donc, et comme le suggère le nom anglais, un possible lien avec l’au-delà. On ne vous en dira pas plus sur le sujet pour ne rien divulgâcher, mais précisons tout de même que le film n’a rien de fantastique.
Si le long métrage s’intitule "Ghostlight", c’est aussi parce que c’est une vraie déclaration d’amour au théâtre et à ce que sa pratique peut apporter. Si le scénario (écrit par la coréalisatrice, Kelly O'Sullivan) se montre un peu jusqu’au-boutiste sur la comparaison entre le vécu de la famille de Dan et la pièce qu’il apprend et joue (on vous laissera découvrir laquelle), cela ne remet pas en question l’essentiel : le film est une apologie du théâtre dans sa capacité à transcender les gens, à les accompagner dans leur résilience, à leur permettre de trouver les mots ou les gestes dont ils ont besoin, à créer du lien, etc. Si le film nous touche au cœur, c’est par la justesse des dialogues et la sincérité de ses émotions. Capable de faire surgir des larmes mais aussi des sourires, "Ghostlight" met en valeur la sensibilité et la singularité de chaque individu, avec un casting d’autant plus touchant qu’il est constitué d’une vraie famille : Keith Kupferer, pour qui la scénariste a écrit le rôle de Dan, partage en effet l’écran avec ses propres femme et fille, Tara Mallen et Katherine Mallen Kupferer. Une riche idée concernant cette dernière, car c’est une vraie perle qu’on espère revoir bientôt ! Enfin, soulignons aussi la formidable interprétation de Dolly de Leon, découverte il y a quelques années dans "Sans filtre".
Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur