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FLAVORS OF YOUTH

Une jeunesse qui sent la naphtaline

Trois segments nous plongent dans les souvenirs et les états d’âme de jeunes urbains dans la Chine contemporaine. Un jeune homme se souvient de sa grand-mère et des nouilles de riz qui ont marqué son enfance (« Les Nouilles de riz »). Une femme travaille dans le mannequinat pour aider sa petite sœur dans ses études (« Un petit défilé de mode »). Et un autre jeune homme retrouve la cassette audio avec laquelle il communiquait avec son amour de jeunesse (« Amour à Shanghaï »)…

Sortie le 4 août 2018 sur Netflix

Le titre de ce film d’animation omnibus est trompeur : ces « saveurs de jeunesse » sont poussiéreuses et surannées, dans le fond comme dans la forme. L’atmosphère est avant tout nostalgique, se tournant vers le passé et reléguant la Chine moderne au statut de décor secondaire d’une société plutôt froide voire déshumanisée, dans laquelle les personnages s’accrochent à leurs souvenirs, comme si le monde contemporain n’avait aucun intérêt. Ce n’est donc pas l’époque actuelle qui intéresse les réalisateurs, mais plutôt le passé révolu, les traditions oubliées, les rêves perdus, les regrets… Certes, cela dit sans doute beaucoup sur la façon dont les Chinois ont rasé des quartiers entiers ou se sont converti à une société de consommation partiellement occidentalisée et superficielle. Mais le style du film ne permet guère de dépasser une forme de lamentation qui sombre quelquefois dans un conservatisme désespérant.

Dans le premier segment, "Les Nouilles de riz", l’ambiance est vaporeuse et mielleuse, avec une petite musique omniprésente qui ne permet pas de sortir d’une allure relativement cul-cul qui sent franchement la naphtaline, tant pour l’esthétique que pour le contenu. Suit "Un petit défilé de mode", que l’on oublie aussitôt à cause de sa vanité et du caractère agaçant de ses protagonistes, dont on peine à comprendre la psychologie. C’est aussi dans cette partie que l’on est le plus dubitatif quant au choix de la langue japonaise pour la version internationale de cette coproduction sino-japonaise se déroulant en Chine, car on a constamment l’impression que cette histoire se déroule à Tokyo. Heureusement, le dernier segment, "Amour à Shanghaï", est bien mieux construit et plus inventif que les précédents. En nous présentant des personnages attachants et une tendre pudeur des sentiments, il permet de retrouver enfin (mais trop tard) une qualité digne des meilleurs films d’animation japonais. Hélas, un épilogue, inutile et peu convainquant, tente artificiellement de relier les segments en faisant se côtoyer les principaux personnages dans un aéroport, avec un discours convenu pour chapeauter le tout.

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

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