ENZO

Un film trop verbeux pour pleinement émouvoir

Synopsis du film

Alors qu’il essaye d’échapper à la voie tracée par ses parents, un adolescent se lie d’amitié avec un garçon de chantier, Vlad. Ils ne viennent pas du même milieu social, ni même du même pays, mais cette relation permet à Enzo d’imaginer un autre futur…

Critique du film ENZO

« Un film de Laurent Cantet. Réalisé par Robin Campillo ». Voilà comment résumer toute l’émotion qui entoure la sortie de ce dernier film du cinéaste derrière ''L’Atelier'', ''Entre les Murs'', ou encore ''Ressources humaines''. Décédé juste avant le tournage, c’est son ami de nombreuses années qui a pris le relais, se donnant pour mission de mettre en image la vision du regretté metteur en scène. Et peut-être que le scénario de ce long métrage était annonciateur de la tragédie, tant celui-ci incarne le mariage des thématiques chères au duo, le rapport des classes sociales de Cantet et le rapport à l’identité sexuelle de Campillo.

Dans un Sud ensoleillé où les cigales chantent leur amour en fond, Enzo est un fils de bourgeois, dans tous les clichés qu’une telle qualification peut comprendre : la maison d’architecte à baies vitrées, la belle piscine, des parents séduisants, des chemises portées de façon à laisser dépasser les poils et les montres de luxe, un frère dont le brillant parcours scolaire lui tend les portes d’Henry IV. Mais dans cette famille de publicité, le garçon est la brebis galeuse, celle qui refuse de suivre les sentiers battus. Semblant culpabiliser de sa richesse, l’adolescent se cherche dans ses relations comme dans son travail, tergiversations qui aboutissent généralement en conflit avec le monde extérieur.

Doux et pudique, ce drame estival est avant tout un récit initiatique, celui d’un gosse paumé, perdu dans ses croyances, dans son rapport aux autres, dans ses propres sentiments charnels. En côtoyant des hommes plus âgés sur les chantiers, il trouve en eux des modèles, interroge sa propre masculinité. Mais c’est surtout avec Vlad qu’une communication troublante va s’installer, d’abord dans un rapport de mentor à apprenti, puis d’amitié avant peut-être d’évoluer vers quelque chose de plus érotique. Œuvre introspective, ''Enzo'' capture magnifiquement les tourments juvéniles, cette difficile quête de soi-même, sans jamais appuyer les non-dits, surligner les évidences. Pas besoin de mot lorsqu’un simple regard suffit.

Mais si le traitement accordé à son protagoniste suscite l’engouement, le sort réservé aux seconds rôles est un peu moins convaincant. Chaque membre de la cellule familiale se retrouve souvent limité à un unique trait de caractère. Et si l’on comprend également la symbolique du soldat, héros de muscle et archétype du virilisme, l’intégration au récit de la guerre en Ukraine sonne des fois plus comme une thématique à la mode que comme un vrai enjeu scénaristique. À part ces quelques bémols, cette ouverture de la Quinzaine des Cinéastes reste une très belle manière de clôturer une riche filmographie, où la tendresse et la délicatesse ont toujours côtoyé des drames personnels et des chimères d’une société meilleure. Monsieur Laurent Cantet, merci.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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