DOSSIER 137
Un thriller tendu au sein de l’IGPN
Synopsis du film
Le soir du 8 décembre 2018, au plus fort du mouvement des « gilets jaunes », le jeune Guillaume Girard est atteint à la tête par un tir de LBD, entraînant une blessure grave et des séquelles irrémédiables. L’enquête est confiée à Stéphanie Bertrand, inspectrice chevronnée de l’IGPN, originaire de Saint-Dizier, tout comme la victime…

Critique du film DOSSIER 137
Le nom de Dominik Moll nous est connu au moins depuis 2000, année de sortie de "Harry, un ami qui vous veut du bien", film très remarqué, notamment à Cannes, et qui l’a imposé comme un jeune cinéaste à suivre. Mais ces dernières années il semble avoir acquis une autre dimension par des réalisations plus régulières et d'une qualité grandissante. On peut également remarquer une tendance à aborder plus volontiers des sujets sociétaux, voire politiques.
"Dossier 137", en compétition pour la palme d'or, apparaît par bien des aspects comme l'aboutissement de ce parcours, qui on l'espère est loin d'être terminé. Si Dominik Moll a toujours eu une grande appétence pour le mystère et le non-dit, "Dossier 137" est seulement son second métrage à réellement prendre la forme d'un film d'enquête traditionnel. Le premier étant "La Nuit du 12", sa dernière réalisation en date qui mettait en scène les membres de la PJ de Grenoble tentant de résoudre l’énigme de l’assassinat d’une jeune femme. Cette fois-ci le cinéaste nous plonge au sein de l'IGPN (la police des polices), avec un souci du détail et du réalisme proche du documentaire. Certes, rédiger des requêtes et des formulaires n'est pas très cinégénique, mais c'est bien là l'essentiel du travail des inspecteurs. Edgar Wright s'en était amusé dans "Hot Fuzz", Dominik Moll parvient à rendre compte de cet aspect de leur travail par quelques séquences très rythmées.
Mais ce n'est qu'une partie du travail, l'essentiel étant, comme dans toute enquête de reconstituer les faits. Dominik Moll avait déjà eu l'occasion de montrer sa parfaite maîtrise de ce registre dans "La Nuit du 12". Et en la matière il n'a rien perdu de son talent. Il réussit à mettre en place une atmosphère tendue d'un bout à l'autre de son récit, bien jalonné par quelques rebondissements et découvertes de nouvelles preuves.
Au-delà de son talent pour la mise en scène et la structure, Dominik Moll fait aussi preuve d'une grande intelligence dans son propos. Refusant de fustiger l'un ou l'autre parti, il laisse le temps à chacun de développer un discours et un contre discours. Comme en démocratie, tout le monde a le droit à la parole, les gilets jaunes, les forces de l'ordre, et l'IGPN qui se trouve inévitablement prise entre deux feux. Même le point de vue du fils de la protagoniste sur le métier de sa mère est intéressant. Et c'était nécessaire, car c'est justement le portrait d'une France totalement fermée au dialogue qui est dressé ici. Enfin soulignons la performance de Léa Drucker qui campe avec justesse cette femme qui se trouve à faire le tampon entre des ennemis qui semblent irréconciliables.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur