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DIVINES

Un film de Houda Benyamina

Portraits organiques et touchants de deux amies en quête de dignité

Maimouna est en train de prier en famille à la mosquée quand, par le soupirail, Dounia l’interpelle pour sortir. Complices et déterminées, les deux amies entretiennent un petit marché noir de produits volés dans les supermarchés. Pour ne pas se faire repérer des vigiles, elles s’enfuient par les couloirs de services pour déboucher dans les cintres d’un théâtre où répète une troupe de danseurs…

« Bâtarde » ! Tel est le surnom cruel et méprisant qui colle à la peau de Dounia. Fille d’une mère fragile collectionnant les hommes et les gueules de bois, la jeune fille tente de se construire un avenir loin du camp de roms où elle a grandi. À l’inverse, Maimouna sa meilleure amie est fille d’imam et connaît une éducation plutôt stricte mais équilibrée. Élèves en BEP pour devenir hôtesses d’accueil, les deux amies réfléchissent à une toute autre carrière. Admiratives de l’une des plus grandes dealeuse de Montreuil, elles vont tout faire pour trouver leur place au sein de cette « entreprise » lucrative, et ce, au risque de se brûler les ailes.

« Mes mains sont faites pour l’or », affirme fièrement Dounia ! Née dans la misère la plus totale, la jeune fille aspire plus que quiconque à s’élever dans l’échelle sociale. Avoir de l’argent ne fait qu’ouvrir des portes, la vraie richesse est ailleurs. Dans la Ferrari virtuelle où elle voyage la tête haute, la jeune fille rêve de reconnaissance loin des émeutes et d’un dieu qui tarde à veiller sur elle. Il suffira d’un peu de maquillage pour transformer la petite cendrillon des bidonvilles en déesse de la nuit. Mais son véritable prince charmant est ailleurs. Comme elle, Djigui veut oublier sa tenue de vigile pour danser avec les étoiles.

Premier film d’Houda Benyamina, "Divines" a la fraîcheur électrique des films réalisés avec les tripes. Une véracité d’expression qui fait vite oublier les quelques faiblesses du scénario qui a du mal parfois à lisser les différentes histoires qui s’entrecroisent. Qu’importe, la réalisatrice a réussi à coller au plus près de ses personnages portés magistralement par trois actrices, qui en plus d’avoir du « clitoris » dévoilent une parfaite justesse de ton. Ni moralisateur, ni revendicateur, le film exprime avant tout une réelle humanité piégée dans un monde figé entre révolte et soumission. Un film qui claque autant qu’il charme, auréolé à juste titre de la Caméra d’or lors du festival de Cannes 2016.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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