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LA DÉSINTÉGRATION

Un film de Philippe Faucon

Le propos, mais sans les acteurs

Dans une cité de la banlieue lilloise, Ali tente désespérément de trouver un emploi. Ayant le sentiment de se voir fermer les portes des entretiens à cause de ses origines maghrébines, il finit par ne plus avoir foi dans le système français. En aidant une connaissance, il rencontre un intégriste militant pour le djihad…

Pour son quatrième film, Philippe Faucon s’attaque à un sujet rarement évoqué sur grand écran et bien délicat à traiter sans tomber dans la stigmatisation ou la polémique déplacée. « La désintégration », titre éloquent pour évoquer le processus inverse de l’intégration des immigrés dans la société française, décortique le processus de lavage de cerveaux qu’opèrent les recruteurs intégristes sur les jeunes en perte de repères et d’idéaux dans les cités HLM. Cette désintégration se vit à travers Ali, jeune de banlieue de bonne volonté vivant avec sa sœur et sa mère dans une cité lilloise qui se démène pour trouver un travail qui lui permette de monter socialement. Il se rend compte très vite qu’il s’agit plus d’un problème d’origines ethniques et sociales que d'une question de compétences. Il devient alors peu à peu frustré et en colère contre le système, et Djamel, un intégriste islamiste du quartier, va se servir de cette frustration pour bâtir sa manipulation.

À l’aide d’un discours très bien huilé basé sur une conspiration orchestrée par « l’homme blanc » envers les musulmans pour mieux les déraciner de leurs traditions et du cercle familial, il leurs promet une destinée de combattants à la gloire d’un Islam vengeur, pour laquelle ils seront récompensés une fois au paradis. D'emblée, le réalisateur prend soin d’éviter pour autant la stigmatisation du croyant en confrontant ce discours à celui d’un imam modéré condamnant les propos de Djamel en rappelant le message de tolérance prôné par le Coran. Au fur et à mesure des séquences qui s’enchaînent entre les prêches de plus en plus vindicatifs envers les impies et ses effets dévastateurs au sein de l’entourage familial d’Ali, il devient évident que l’objectif de Djamel est d’isoler ses disciples de tout autres angles de vues afin de les emmener vers la voie irréparable de la préparation d’attentat suicide. Et l’accession au statut de Martyr est le but ultime de cette vie choisie à leur place.

Philippe Faucon dresse donc un constat clair permettant de mettre en lumière les origines de cette « désintégration ». Mais cela suffit-il pour en faire une fiction captivant l’intérêt du spectateur ? Malheureusement non. Il manque à ce long-métrage une mise en scène et des enjeux qui tiennent l’audience en haleine. Malgré le drame qui se prépare, aucune tension n’est palpable, la faute en grande partie à une interprétation faiblarde de l’ensemble du casting. Aucune empathie n’est ressentie envers ces personnages, qu’ils soient victimes ou bourreaux. Djamel l’intégriste est d’une caricature impressionnante. Yacine Azzouz de sa voix monocorde et de son regard mono-expressif nous laisse de marbre et l’on a du mal à croire que cet unique individu soit capable d’enrôler trois jeunes pour un attentat kamikaze. Ses disciples sont aussi inertes que des huitres et même si Ali, interprété par Rashid Debbouze (le frère de Jamel, qui fait de son mieux), est celui qui est le plus développé, on ne se sent jamais impliqué dans sa destinée. Finalement, tout ceci fait de « La Désintégration » une œuvre intéressante pour ce qu’elle a à dire mais pas pour ce qu’elle a à montrer. Pour du Cinéma, c’est bien là tout le problème…

Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur

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