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LE DÉMANTÈLEMENT

Un film de Sébastien Pilote

Le père Gagnon

Gaby a soixante-trois ans et possède la ferme Gagnon et fils dans laquelle il élève des moutons. Contrairement à ce que le nom de son entreprise laisse entendre, il n'a pas de fils. Il a deux filles qui ont construit leurs vies à la ville. Lorsque l'une d'elle lui annonce son divorce et lui demande de l'argent, il décide de vendre l'ensemble de son domaine…

Deuxième film du réalisateur québécois Sébastien Pilote, "Le Démantèlement" pourrait se tenir comme une adaptation du Père Goriot de Balzac transposée de nos jours en pleine province du Québec. Divorcé, Gaby est un éleveur de moutons qui gère seul son affaire agricole. Mais il n'a pas de fils. Il a élevé deux petites princesses exilées en ville qui n'ont que faire de la vie paysanne. Elles ne rendent visite à leur père que trop rarement. Et lorsque Marie, l'une d'elles, resurgit, c'est pour annoncer son divorce. Il lui faut 200 000 dollars pour racheter la part de son mari afin de récupérer la maison. Gaby, comme le père Goriot, ferait tout pour le bien être de sa fille. En bon père aimant, il décide de vendre l'affaire, la maison et le cheptel pour aller vivre dans un petit appartement en ville.

La première demi-heure du film dresse un malheureux constat sur la désertification des campagnes, l'impossibilité de transmettre du fait du désamour des jeunes pour les métiers agricoles, mais évoque aussi le déclassement des jeunes générations par la dette. Marie est endettée tout comme son mari. La vie à crédit fait croire à l'enrichissement matériel, mais Gaby réalise que Marie n'a pas tellement de moyens. Vient ensuite la décision du démantèlement malgré les multiples mises en garde de son ami comptable. Gaby a la soixantaine. Vers quel métier pourrait-t-il se convertir s'il venait à démanteler sa ferme ? Après la désolation du terroir, Sébastien Pilote amène alors les sujets de l'appauvrissement et du refus d'embaucher des séniors sur la table. Le réalisateur distille une certaine mélancolie portée par un acteur principal (Gabriel Arcand) formidable de sensibilité.

Le film est divisé en deux parties, presque symétriques, dédiées à chacune des deux filles de Gaby, comme pour montrer leur place centrales dans les décisions de cet agriculteur. Tandis que Marie manipule son père par les sentiments pour lui permettre de continuer à vivre à Montréal, Frédérique, la cadette interprétée par Sophie Desmarais (remarquée dans "Sarah préfère la course"), apparait comme beaucoup plus authentique et soucieuse du bien-être de son père. Marie est à l'origine de la vente mais c'est Frédérique qui assiste au douloureux démantèlement de la ferme. Bien qu'il n'ait rien pu transmettre et qu'il ne voit quasiment jamais ses filles, il reste fier de ce qu'elles sont devenues en ville. Peut-être que finalement sa ferme lui a apporté plus de soucis de que de sécurité…

Lauréat du Prix SACD lors de la 52ème édition de la semaine de la critique, "Le démantèlement" est un beau film sur la transmission rappelant au passage que les réalités sociales et démographiques de la France touchent également le Québec.

Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur

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