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DANIEL ET ANA

Un film de Michel Franco

Faits diversaffligeants au Mexique

Daniel et Ana sont deux frères et soeurs, complices, qui mènent une vie calme dans une maison fortunée. Elle, en plein préparatifs de mariage, lui en pleine découverte de ses premières amours avec sa copine. Jusqu'au jour où ils seront kidnappés alors qu'ils allaient faire une course, obligés à faire l'amour devant une caméra, puis relâchés. Après cela, rien ne sera pareil entre eux...

Tiré d'une histoire vraie, « Daniel y Ana » est un film qui dénonce des séries d'enlèvements au Mexique, qui servent à faire des films pornographiques à budget zéro, avec lesquels certains se font beaucoup d'argent. Mais c'est aussi un film qui montre comment une relation frère et soeur idyllique se dégrade face à un événement aussi traumatisant.

Pendant tout le film, on peut se demander où Franco veut nous emmener. D'abord on pense qu'il souhaite nous montrer la violence et le dégoût de ces actes pour lesquels les ravisseurs peuvent demander une rançon ou exercer un chantage, surtout parce qu'il s'agit de l'enlèvement des deux enfants d'une famille très friquée. Puis on reste dans le trouble jusqu'à la fin, se demandant quand vont ressurgir ces énergumènes complètement pervers. Ensuite, on devine que son intérêt va vers cette relation fraternelle gâchée, accentuant le mal-être et la culpabilité qui anime chacun des personnages.

Malgré un thème très perturbant, le but du réalisateur n'est pas de choquer son audience. Les images ne sont pas crues, et la scène « d'amour » n'est pas non plus pornographique. D'ailleurs, les éclairages et la mise en scène soignés contribuent à cette "neutralité". Il s'attarde avec compassion sur chacun de ses personnages, qui vivent cet abus à leur façon, passant tous deux d'abord par une phase d'enfermement, puis par un désir de thérapie chez l'un, et une violence intérieure et sourde chez l'autre.

Ce qui manque à ce film, pour nous faire entrer dans l'univers des personnages, reste la tension. La tension qui existe entre le frère et la soeur qui n'osent plus se regarder, la tension émanant de cette non communication qui les ronge et les obnubile. Pourtant, dans les faits, elle est bien présente, mais dans la réalisation, ni le thème musical répétitif choisi... rien ne nous oppresse vraiment, à part peut-être les cinq dernières minutes.

Pour ce premier long métrage, Mickael Franco nous livre une histoire dérangeante, intéressante et poignante, avec beaucoup de pudeur. Exercice réussi, pour le réalisateur mexicain.

Véronique LopesEnvoyer un message au rédacteur

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