CROSSING ISTANBUL
Un indispensable voyage vers l’autre
Lia recherché sa nièce Tekla, femme transgenre. Apprenant par le jeune frère d’un des voisins de celle-ci, qui est un de ses anciens élèves, quelle est partie s’installer à Istanbul, elle accepte la proposition de celui-ci, de l’accompagner. Achi, qui parle en effet anglais, prend alors le bateau avec elle, dès le lendemain…

Double Portrait troublant, d’une femme trans exilée en Turquie (en creux) et de sa tante géorgienne, "Crossing Istanbul" avait fait l’ouverture de la section Panorama du Festival de Berlin 2024. Road movie où l’on prend plus le ferry que la route, le film suit Lia, prof à la retraite, bien décidée à retrouver sa nièce, Tekla, partie à Istanbul, accompagnée d’Achi, jeune homme qui voit dans cette quête l’occasion d'échapper (au moins un temps) à sa vie miséreuse chez son frère, qui le traite comme un petit voyou. A travers cette double focale offerte par ces deux personnages très différents, et en maintenant le doute sur les intentions du jeune homme, c’est une vision hétéroclite et ouverte de la ville d'Istanbul qui nous est offerte.
La quête de l’une les mènera ainsi dans les quartiers pauvres, où la prostitution fleurit mais les femmes se serrent les coudes, et dans des quartiers plus touristiques, entre restaurants, enfants des rues et populations de chats. Tandis que l’exploration de l’autre nous emmènera à la découverte d’une vie nocturne ou alternative, où la jeunesse s’épanouit. À la fois nostalgique et touchant, ce voyage est autant empreint d’une humanité à fleur de peau, dans la caractérisation de chaque personnage, que de la douleur des regrets, la dureté des relations familiales s’effaçant pour offrir une fin particulièrement émouvante, où l’expression de ceux-ci s’offre en geste salvateur. Saluons enfin la performance de Mzia Arabuli, formidable de distance maîtrisée, et Lucas Kankava, convaincant en jeune chien fou, dont l’avenir reste à décider.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur