CONFIDENTE
Un huis-clos particulièrement tendu
1999. Arzu travaille dans un centre d’appel de messagerie rose, dans la banlieue d’Ankara, en Turquie. Mais suite à un violent tremblement de terre, un garçon mineur la rappelle, disant être pris sous les décombres. Elle va alors tout faire pour l’aider, sans quitter son poste…

Les films basés totalement ou en partie sur des conversations téléphoniques, les contraignant au huis clos, ont fait le buzz ces dernières années ("The Guilty" et son remake US, la comédie romantique "Elle et Lui et le reste du monde" avec Victor Belmondo…). Voici que cette fois, Çağla Zencirci et Guillaume Giovanetti ("Sibel" et "Noor") situent leur action en Turquie, avec comme protagoniste une femme, Arzu, s’adonnant qui plus est à des dialogues érotiques avec les clients d'une ligne de téléphone rose. Une activité qui lui vaut des coups de fils de toutes sortes, de l’homme qui veut « se faire baiser » (mais n’est « pas gay », car marié…) à un autre qui l’insulte et prie en exigeant qu’elle se repente, en passant par un groupe d’ados mineurs là pour s’amuser, ou divers habitués. En quelques instants, le panorama est posé, Arzu doit composer avec les fantasmes plus ou moins malsains, les personnages inventés de toutes pièces, les pulsions de violence derrière la misère sexuelle, une personne connue qu'elle reconnaît, des clients dont elle note la vie et qu’elle doit garder en ligne le plus longtemps possible.
Mais la tension va commencer à monter, grâce à deux ingrédients savamment amenés : un appel lié à un mystérieux carnet et un tremblement de terre qui voit l’un des ados se retrouver piégé dans les décombres, avec pour seul contact ce numéro de téléphone. Habilement, le scénario parvient à nous tenir en haleine, rien qu’avec la voix et les réactions d’Arzu (formidable Saadet Işıl Aksoy, vue dans "Eastern Plays") et les conversations avec ses divers interlocuteurs, les infos venant renforcer l’angoisse par des nouvelles sur une affaire de corruption et sur l’avancement des recherches. Comme prisonnières dans leur standard, Arzu et ses collègues (débarque ici un soupçon de rivalité) sont des personnages qui mettent en évidence la manière dont les hommes traitent les femmes, l’exploitation dont elles sont victimes et le peu de libre arbitre qu’on leur attribue. Alors laissez vous embarquer et enfermer dans ce thriller à la belle tension, aussi politique qu’efficace.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur