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CHOKING MAN

Un film de Steve Barron

Crise d’identité chez les immigrés américains

Jorge, immigré équatorien et plongeur dans un restaurant new-yorkais, est maladivement timide. Il ne parle à personne, ne fréquente personne, si ce n’est son grand frère qui vit dans le même appartement que lui. Un jour, une jeune chinoise est engagée en tant que serveuse dans le restaurant. Jorge, touché par l’attention qu’elle lui porte, essaie de s’ouvrir à elle…

C’est un vrai coup de cœur que ce film indépendant américain qui tire le portrait de Jorge, un jeune latino d’une vingtaine d’années qui vit à New York et qui travaille comme plongeur dans un restaurant du Queens. Sa vie ressemble à un tableau noir et triste, ponctuée par les trois « o » : métro, boulot, dodo. En plus Jorge habite un appartement miteux, vit par procuration à travers les séries télé US et a un grand frère tyrannique qui essaie de le sortir de ses retranchements. Jorge est, en effet, un grand timide. Il parle peu et se cache tantôt derrière ses cheveux, tantôt dans sa capuche.

Steve Barron, le réalisateur, est allé très loin dans l’analyse psychologique de ses personnages. Et ils sont nombreux à graviter autour de Jorge, le réalisateur laissant à chacun le temps de s’exprimer, de s’ouvrir aux autres et au spectateur par la même occasion. On trouve ainsi le patron du restaurant (boss sympa mais respecté), la serveuse (qui connaît tous les clients à force d’accumuler les années derrière le comptoir), le jeune cuisto (ex-taulard au grand cœur, charmeur mais un peu lourd) et la dernière venue, une jeune chinoise que tout le monde cherche à séduire y compris Jorge qui prend beaucoup de plaisir à la regarder. Mais comment l’approcher ? Comment lui faire comprendre ? Ou pire, comment lui parler quand on n’arrive pas à aligner trois mots dans une même phrase ?

Le réalisateur usera d’un peu de poésie (le dragon rouge et la balade avec le discman), d’un zeste de métaphore (la méthode Heimlich) et de quelques oppositions de style pour amener Jorge sur la voie de la confrontation, d’abord avec lui-même, puis avec autrui. Car son mal est avant tout propre à lui-même. Son problème n’est pas les autres, c’est d’abord lui ! Une intelligente façon de mettre en exergue le problème d’identité des immigrés américains, un peu chez eux sans être totalement à leur place.

L’ensemble du casting est impeccable, l’ambiance du film nous promène entre éclaircies et orages et la mise en scène surprend d’autant plus que Steve Barron a commis les aventures au cinéma des « Tortues Ninja » ! Ce « Choking man », film personnel et ambitieux présenté au festival de Deauville 2006, constitue donc une jolie surprise cinématographique.

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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