BONJOUR L'ASILE
Le foutoir de nos vies
Jeanne, responsable d’une association de moins de dix salariés, accumule les ennuis administratifs. Elle part à la campagne rendre visite à son amie Elisa, qui doit faire pour elle les illustrations d’un livre, et qui a eu un bébé et a choisi de vivre dans la nature, entre permaculture et vie plus calme. Mais rapidement entre préoccupations et insatisfactions de l’une et de l’autre, la tension monte, et Jeanne est obligée de partir. Ne trouvant pas de train pour rentrer, elle va demander à être hébergée dans l’HP (Hospitalité Permanente), tiers lieux voisin occupant un château mis à disposition par la Mairie, qu’Amaury, promoteur, souhaite racheter…

Ne cherchez pas dans "Bonjour l’Asile" une structure claire ou un fil rouge établi. Comédie sociale et politique, le film semble se construire autour du chaos de nos vies, que l’on ai choisi de rester à la ville en tentant de faire valoir ses valeurs d’entraide (comme Jeanne) ou de s’isoler à la campagne, en réclamant de récupérer le contrôle de son temps (comme Élisa). Pourtant la charge mentale d’Élisa n’a pas diminué entre les enfants et les efforts que demandent une vie éloignée de la société de consommation (ne serait-ce que le potager ou les couches lavables...), où l’on produit sa nourriture et ses propres produits. Ainsi la voie d’une certaine sérénité a bien du mal à se dégager, mais la vie dans une communauté (celle du tiers lieu l’H.P.) va peut être aider. A condition que celui-ci ne se fasse pas manger par un projet immobilier visant à faire du château un hôtel de luxe.
Volontairement caricatural, y compris dans la description des bourgeois lors d’un repas entre ami (le concept de « Territoire et Luxe », la chaude pisse placée comme signe d’hypocrisie…) ou la présentation du projet pour le château (valeurs, « slow tourisme, réalité augmentée…), le scénario, s’il se perd dans de multiples détails ou personnages (notamment autour de l’HP) capte tout de même les contradictions et le malaise généralisé du moment. Tout en opposant société de consommation et lieu de retraite, le trait est un peu gros même s’il touche parfois juste (la répartition des tâches homme-femme en planning 50/50, l’« évitement et [la] honte qui glisse »...), le film se pare aussi dune charge féministe parfois un peu facile (la vision d’elle-même en mec avec un gros bide, l’orgasme égoïste de l’homme...), et n’évite pas au final un certain syndrome du repli sur soi. Reste deux portraits de femmes en quête d’une liberté retrouvée, qui s’unissent dans leurs revendication, au travers d’un récit certes décousu mais souvent drôle et cynique.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur