BIRTH RIGHT

Un film de Naoki Hashimoto

Au nom de la mère

Depuis quelques jours, Mika observe à distance un couple marié et leur fille, Ayano. Après avoir gagné la confiance de cette dernière, Mika va la kidnapper et la séquestrer dans un bâtiment désaffecté…

« Je ne fais pas des films pour distraire. Je pense que les films sont faits pour naître au cinéma et ne pas en sortir ». Tels seront les mots prononcés par Naoki Hashimoto avant la projection de son film au 13e festival du film asiatique de Deauville. D’emblée, nous pouvons attendre un film sans concession de la part de son réalisateur si ses propos se retrouvent pleinement à l’écran… et c’est le cas.

En partant d’un sujet universel, qui est celui des orphelins et de leur désir d’appartenance à une véritable famille, Naoki Hashimoto, dont c’est le premier film en tant que réalisateur (l’homme est déjà producteur ciné et télé), arrive à dériver vers le film de genre, le film de captivité. Dès les premiers plans montrant Mika immobile, cachée derrière des arbres, observant à travers une baie vitrée le quotidien banal d’une famille, on sait que Hashimoto va nous livrer une œuvre personnelle, hors des sentiers battus de ce type de production. Ces plans rappelant « Le Sixième sens » (« Manhunter » en VO) de Michael Mann (mais sans le côté flashy 80’s propre au réalisateur chicagoen), annoncent d’emblée que quelque chose de grave va se passer. Mais là ou d’autres auraient également tendance à verser dans le sensationnel et la violence physique à outrance, tel « Funny Games » de Haneke (ce qui est loin d’être un défaut en soi), « Birth Right » est un film tendu, jouant sur une captivité lente et psychologiquement douloureuse. Pas besoin de massacrer son prisonnier à coup de club de golf, lorsque l’on a le temps de le laisser mourir naturellement, si on le souhaite. Car la violence graphique n’intéresse pas Hashimoto, tout comme l’appartenance à un genre.

Possédant une cinématographie basée sur l’usage de longs plans et un montage simple (pas simpliste) et efficace, Hashimoto ne fait que très peu d’erreurs. Quelques plans s’enchaînent mal par ci par là, mais ce n’est qu’un léger détail, rapidement pardonné par la maitrise du cadre et la gestion millimétrée de l’espace. Portés à l’écran par des actrices aussi belles que talentueuses, les deux personnages principaux sont d’une justesse dont devrait s’inspirer beaucoup de monde. Entre deux scènes magnifiques (la rencontre entre la captive et sa tortionnaire ainsi que le climax très émouvant), la captivité repose sur le jeu posé de la première, confronté à la peur maitrisée (« mais je trouve qu’elle surjoue encore », dira Hashimoto de sa jeune actrice) de la seconde.

Histoire de vengeance ou quête de d’un amour perdu, chacun est libre d’interpréter et de s’approprier le film comme il le souhaite, le réalisateur nous livrant un produit appartenant désormais à son spectateur. Souhaitons à Naoki Hashimoto que ce premier essai soit suivi de nombreux films, tant il est rare de voir autant de dévotion et de refus de compromis de nos jours. « Je pense que mon film ne plaira qu’à 20% de son public ». Ce qui est sûr, c’est que nous en faisons partie.

François ReyEnvoyer un message au rédacteur

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