BELLADONE

Un film de Alanté Kavaïté

C’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe

Dans un future proche, une jeune femme s’occupe d’un groupe de personnes âgées sur une île. Un jour, un voilier débarque avec à bord une femme médecin et son frère. Si cette arrivée refait naître la joie sur l’île, rapidement, les décès s’accumulent…

L’ Atropa belladonna, plus communément appelé la belladone, est une plante qu’on surnomme également « cerise du diable » ou « morelle perverse », la faute à ses baies noires très toxiques. Pourtant, elle peut également être utilisée dans différents remèdes grâce à ses nombreuses vertus thérapeutiques. Le film n’a pas choisi ce titre au hasard, même s’il ne sera pas question de botanique, n’en conservant que la sève pour développer une métaphore poétique animée par cette dualité. En 2050, une loi impose aux personnes âgées de vivre en institution. Sur une île, un groupe de séniors résiste, aidés de la jeune Gaëlle, continuant à vivre à l’air libre selon leurs envies. Coupés du monde, leur quotidien va être bousculé par l’arrivée d’un voilier. À bord, un beau jeune homme et sa sœur médecin. Et les équilibres de vaciller.

Fable philosophique ô combien actuelle, le métrage questionne évidemment le rapport de nos sociétés à nos aînés, à une époque où le vieillissement de la population est au cœur des préoccupations politiques. Mais Alanté Kavaité ne compte pas se servir de sa caméra pour apporter des réponses ou son point de vue (même si le dénouement laisse un fort avis sur ce qu’il peut être), préférant la réflexion au raisonnement déjà tout fait. En parfait équilibriste, la réalisatrice et scénariste joue des contours de la réalité, assume un symbolisme de chaque instant et se sert de la science-fiction comme d’un moteur mélancolique à un récit tantôt onirique tantôt clinique.

Habile et intelligent, ce conte moderne peut s’appuyer sur un casting impressionnant (Nadia Tereszkiewicz, Dali Benssalah, Daphne Patakia, Miou-miou, Patrick Chesnais, Jean-Claude Drouot, Féodor Atkine…) pour confronter les idéologies : doit-on protéger les vétérans, prendre soin d’eux pour qu’ils vivent le plus longtemps possible, quitte à brider leurs désirs et envies ? Ou doit-on laisser nos « vieux » profiter de leur vie comme ils l’entendent, vivre sans retenue et sans restriction jusqu’au dernier souffle, même si cela implique une existence plus courte ? Passionnant sur le fond, un poil trop mécanique sur la forme, ''Belladone'' demeure un OVNI dans le paysage cinématographique hexagonal, une proposition rare et singulière qui invite au débat sans caricature. Et ça fait du bien !

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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