BEETLEJUICE BEETLEJUICE
Une suite plus que réjouissante
Après la disparition tragique de son beau père lors d’une expédition photos, Lydia Deetz, devenu présentatrice d’un show télé sur les fantômes intitulé Ghost House et sa mère Delia, galeriste, reviennent à Winter River pour l’enterrement, et se réinstallent dans la maison où ils avaient été hantés par le couple Maitland, aidé alors par le démoniaque Beetlejuice. Mais un artiste français capricieux tombant dans une bouche d’égouts en sortant de la galerie se retrouve dans l’After life (l’au-delà) et réveille accidentellement l’ex femme de Beetlejuice, autrefois découpée en morceaux et jurant une fois recousue de se venger de celui-ci. De plus, la fille de Lydia, Astrid, adolescente rebelle, découvre la maquette située dans le grenier et rouvre un portail vers l’Au-delà, d’où sa mère parvient à les ressortir. Mais elle fait ensuite la connaissance d’un garçon du voisinage qui lui propose de la retrouver pour la soirée d’Halloween, lui permettant de découvrir ses propres dons…
Trente six ans avec le premier volet, "Beetlejuice" (1988), oeuvre particulièrement culte de la filmographie de Tim Burton, celui-ci a retrouvé comme il le dit lui-même le goût de réaliser des films, grâce à une liberté de création retrouvée, qu’il avait visiblement perdue avec son passage chez Disney (l'assez lisse "Dumbo " notamment). Présenté en ouverture de la Mostra 2024 et ayant surpris très positivement, le long métrage permet de retrouver la plupart des noms du casting initial : Winona Ryder (qui connaît un rebond inespéré de sa carrière depuis la série "Stranger Things"), Michael Keaton, Catherine O’Hara… Et c’est l’héroïne de sa série Netflix "Mercredi", inspirée de l’univers de "La Famille Addams", Jena Ortega, qui se retrouve cette fois-ci dans le rôle de la fille rebelle, celle du personnage de Winona Ryder, qui va faire revenir le fameux Beetlejuice.
"Beetlejuice Beetlejuice" bénéficie non seulement d’un scénario bien plus consistant que celui du premier volet, mais il permet surtout à l’auteur de nous en apprendre plus sur le monde de l’After Life et son fonctionnement, dévoilant au passage bon nombre de créatures qui le peuplent. On découvre ainsi les bureaux de Beetlejuice (Afterlife Call) avec ses assistants pygmées en costards tous prénommés Bob, des morts en salle d’attente, comme un père Noël calciné et un magicien noyé enchaîné dans un cube rempli d’eau, ou encore l’existence du Soul Train, un train vers la disparition réelle, emmenant les fantômes vers la suite. Mais cela est aussi l’occasion d’introduire de nouveaux personnages, comme ceux de Justin Theroux, louche producteur, qui fait sa demande en mariage à Lydia à peine l’enterrement du beau père terminé, de Willem Dafoe (qui semble particulièrement s’amuser ici), en policier membre de la Afterlife Crime Unit, qui a Beetlejuice dans le collimateur, ou encore de Monica Bellucci, ironiquement rapiécée sur le tonitruant "Tragedy" des Bee Gees.
Malheureusement, à l’image de ce personnage, qui ne revient étrangement qu’à la fin, pour une semi-conclusion un peu expédiée, les multiples sous-intrigues ne seront pas traitées avec la même importance. Mais "Beetlejuice Beetlejuice" aligne pour notre plus grand plaisir de nombreuses références au premier opus comme à d’autres créations de Burton. Si Lydia, peut toujours voir les morts, c’est à l’exception de son mari, lui aussi décédé lors d’une expédition en Amazonie. Celui-ci, comme le beau-père dévoré par un requin (l’histoire de son crash dans l’océan fait l’objet d’un flash-back délirant en stop motion…) réapparaîtront un instant au cours de l’intrigue. À noter aussi la reprise de la chanson de la scène culte (le repas avec les invités, où Beetlejuice les obligeaient à danser et chanter) en version chorale lors de l’enterrement, ou encore l’utilisation du même principe de prise de contrôle des gens sur la fin du film. Mais on a droit également à une référence à La Chose de la Famille Adams avec une main autonome, et à de nombreux jeux de mots (comme une illustration de « spit your guts ») auxquels nous avait habitué le personnage-titre.
Tim Burton semble ainsi réellement s’amuser, en incluant un flash-back sur la rencontre de Beetljuice avec sa femme, façon vieux film italien en noir et blanc, ou en faisant référence aux films de Mario Bava, dont l’un aurait déclenché la perte de eaux de Lydia avant son accouchement. En choisissant d’utiliser des effets spéciaux pour la plupart traditionnels et artisanaux de l’époque du premier, notamment à base de marionnettes, il donne à son film un cachet qui l’inscrit dans la continuité du premier, et qui n’en semble pas moins moderne. On s’amusera ainsi autant de la manière dont certains personnages sont aspirés, façon baudruche par la femme de Beetlejuice (avec en bonus des yeux qui éclatent comme des balles de golf…), que l’accouchement cauchemardesque d’un mini-Beetlejuice, ou qu’un nouveau passage chez les vers du désert. Une très belle réussite qui devrait faire les beaux jours des salles en cette rentrée, la richesse des détails pouvant potentiellement pousser certains à retourner plusieurs fois voir le film.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur