BAJO LAS BANDERAS EL SOL
Les dessous d’une dictature méconnue
Le Paraguay est un pays d’Amérique latine, coincé entre deux géants, le Brésil et l’Argentine. Celui a vécu sous le joug de la dictature de 1954 à 1989, après un coup d’État, son dirigeant, le général Alfredo Stroessner ayant fait changer la constitution pour pouvoir être réélu tous les 5 ans. Mais les images de cette période sombre restent rares…

Parmi les pays à d’Amérique latine, on connaît surtout les dictatures argentines et chiliennes, qui ont fait l’objet de nombreux films de fiction marquants. "Missing" de Costa Gavras, la trilogie de Pablo Larrain ("Tony Manero", "Santiago 73, Post Mortem", "No") ont été parmi les longs métrages, dévoilant tortures, éliminations arbitraires, musellement de la presse… Mais lorsqu’il s’agit de documenter la réalité, finalement peu de documentaire se sont attaqués au Paraguay, pays qui nous est brièvement présenté ici, par de multiples cartes et des commentaires dans diverses langues. Mais rapidement le ton change, évoquant un coup d’État militaire en 1954, avec images de navires, de tirs et d’avions de chasse, avant de s’intéresser aux images qui restent : celles de la glorification de celui qui en sorti leader, le général Alfredo Stroessner, décédé en 2006.
Le reste du film tente avant tout, parfois par l’ironie de montages à l’envers (un défilé, une publicité pour une ligne aérienne…), de démontrer l’absurdité et l’hypocrisie d’un système faisant perdre son sens à tout un tas de mots, porteurs de valeurs : démocratie, liberté, justice sociale (par leur répétition insistante à la radio), élections (par des images d’affiches toutes identiques), festivités (par la superposition d’images et d’une chanson à la gloire du leader), respect de l’environnement (par la juxtaposition d’une simulation de remplissage d’un immense barrage, et la diffusion de vraies images, montrant la dévastation et l’impact sur la faune)… Par un montage cumulant les oppositions signifiantes, comme par le voile qu’il lève sur l’opération condor (prétendue opération partagée entre plusieurs pays où terroriste signifiait communiste, intellectuel, journaliste, opposant politique…), la découverte des archives sur les disparus, les liens entre militaires et cocaïne, ou la persistance au pouvoir du fameux parti Colorado, Juanjo Pereira donne envie d’en savoir plus sur ce pays lointain, qui semble ne pas encore avoir éloigné tous ses vieux démons, le parti Colorado étant notamment toujours en place.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur