ARRÊTE AVEC TES MENSONGES

Un film de Olivier Peyon

S'autoriser l'intime

Stéphane Belcourt, romancier, a accepté de revenir dans la ville de son enfance, pour être le parrain du bicentenaire d’une marque de cognac. Là, les souvenirs remontent à la surface, lui qui y a vécu son premier grand amour, à l’âge de 17 ans, avec un certain Thomas. A l’appréhension s’ajoute cependant rapidement un mélange de gêne et de curiosité, lorsqu’il découvre parmi l’équipe organisatrice, que l’un des guides n’est autre que le fils de cet homme qu’il n’a jamais oublié…

Arrête avec tes mensonges film movie

Adapté d'un roman autobiographique de Philippe Besson paru en 2017, "Arrête avec tes mensonges" interroge la mémoire et le besoin de se retourner sur son passé, autant que la part de réalité qu'un auteur va pouvoir mettre dans ses écrits. Un sujet certes maintes fois rebattu et permettant une mise en abyme évidente lorsqu'il s'agit de cinéma, qui est ici traité sous l'angle de l'homosexualité (ou de la bisexualité), entre celui, parti, décidé à l'assumer, et l'autre, resté, bien décidé à la cacher. Un dialogue du film résume d'ailleurs assez bien l'une des capacités mêmes d'un auteur à composer avec la réalité - « C'est pas des mensonges d'inventer des histoires », « sauf si vous les inventez pas » -, celui-ci pouvant alors imposer sa vérité sur un événement ou une relation donnés. Par un montage qui joue l’imbrication très serrée entre des événements d'aujourd’hui, qui obligent le romancier à se confronter non seulement à son passé mais aussi à ce qu'il a raté de la vie de l'autre, et des moments du passé, c'est toute la différence entre le feu de la jeunesse et l'apparente solitude tranquille de l'âge mûr qui peut se mesurer ici.

N'hésitant pas à montrer quelques scènes de sexe plutôt frontales et crues (dans un gymnase désaffecté, autour d’un lieu fondateur, une carrière d’exploitation en eaux...), c'est l'évolution d'une relation physique vers quelque chose de plus personnel qui est décrite ici. Une histoire qui se dévoile peu à peu, éclairant le comportement actuel du personnage interprété par Guillaume De Tonquédec, dont la confrontation avec les lieux et avec le fils de son ami, joué par Victor Belmondo, qui tente de comprendre qui était son père, lui permettra de se sentir enfin « autorisé » à écrire sur cette histoire, sans risquer de blesser quelqu'un. Émouvant, "Arrête avec tes mensonges" traite aussi avec tact, notamment grâce au personnage de la toujours (ici en apparences) pétillante Guilaine Londez (voir la scène clé du bar...), de l'écart entre urbain et rural sur de pareilles questions de vie privée, son personnage affirmant avec justesse que « rester c'est pas forcément subir ».

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

Laisser un commentaire