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L'AFFAIRE ROMAN J.

Un film de Dan Gilroy

Le « Denzel Washington show », cuvée 2018 : savoureux mais pas assez maîtrisé

Roman J. Israel est un avocat de l’ombre. Il passe la plupart de son temps le nez dans ses dossiers, prépare méticuleusement le moindre argument des plaidoyers qui permettent à son associé et mentor de briller au tribunal. Mais la mort de celui-ci va obliger Roman à sortir de sa tanière…

Avant de plonger Jake Gyllenhaal dans un thriller horrifique, le réalisateur de "Night Call" a choisi de s’arrêter par la case judiciaire. Et pour interpréter un avocat à la verve généreuse, qui mieux que Denzel Washington ? Après avoir excellé dans "Fences" l’année passée, le comédien brille à nouveau dans un exercice quasi-théâtral promis à lui offrir une nomination aux Oscars (ce qui fut bien le cas, pas de panique). Tout comme le film pré-cité, "L’affaire Roman J." voit sa structure narrative reposer intégralement sur la performance de l’acteur, dont l’éloquence et la fougue doivent servir de moteur à l’ensemble.

Heureusement pour Dan Gilroy (et pour nous), Denzel avait décidé de sortir le grand jeu. Il interprète Roman J. Israel, un avocat de l’ombre, un bourreau de travail capable de mémoriser intégralement le Code pénal comme toutes les décisions judiciaires sur lesquelles il a un jour posé les yeux. Mais lorsque son associé et mentor décède subitement, le voici obligé de relever la tête de ses bouquins pour trouver la lumière qu’il mérite. Sur ce chemin inédit, ses rencontres avec le playboy George Pierce, ainsi qu’avec une militante pour les droits civiques, ne vont pas simplifier son processus de sociabilisation, bien au contraire.

Original et décalé, le film a toutefois trop tendance à s’appuyer sur ses joutes verbales aiguisées, délaissant un récit dont les contours sinueux deviennent difficiles à appréhender. Car à se focaliser sur le verbe, le réalisateur a totalement oublié la consistance et la cohérence de sa trame narrative, enfermant ses protagonistes dans des rebondissements pas toujours bienvenus. Multipliant les tonalités et les discours, le métrage se perd au point d’annihiler tout son discours contestataire sur le système judiciaire américain. Si les personnages demeurent excellents, les intrigues les entourant se mêlent maladroitement dans une œuvre brouillonne qui laisse entrevoir ce qu’aurait pu être ce pamphlet s’il avait été mieux maîtrisé.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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