28 ANS PLUS TARD

Un film de Danny Boyle

28 ans plus tard et toujours aussi fou

Synopsis du film

Cela fait maintenant 28 ans que le virus de la Rage a décimé une bonne partie du Royaume-Uni. Fortement surveillées par l’OTAN, les côtes britanniques sont impénétrables : rien ne rentre et rien ne sort. Mais des survivants ont réussi à trouver un havre de paix sur une petite île au large. Et lorsque Jamie emmène son fils Spike sur le continent pour un rite de passage, ce monde oublié va vite leur rappeler qu’il est toujours aussi dangereux…

Critique du film 28 ANS PLUS TARD

Lorsque le réalisateur britannique Danny Boyle s’attaque au mythe du zombie en 2002, personne n'était prêt pour le choc à venir. Auréolé de ses succès précédents ("Petits meurtres entre amis", "Trainspotting" et "La Plage"), le cinéaste s’empare d’une caméra numérique et balance son personnage dans un Londres vide rappelant dorénavant des réalités bien connues. Avec son grain typique du format utilisé (le mini DV pour les puristes), sa modernisation du mort-vivant qui devient ici un infecté et son discours sur la notion de monstre lorsque les sociétés modernes s’effondrent, "28 jours plus tard" aura marqué plus d’un esprit et s’inscrit parfaitement dans la filmographie d’un esthète de l’image, aussi vain pour les uns que génial pour les autres. La suite, "28 semaines plus tard", se fera sous la houlette d’un réalisateur différent, Juan Carlos Fresnadillo, mais avec Danny Boyle toujours à la production avec son scénariste Alex Garland. Aussi efficace et politique que le premier opus, notamment sur l’ingérence américaines lors des conflits, ce second opus avait également ouvert les portes en dehors de la Grande-Bretagne et se terminait sur une image glaçante d’un Paris peu à peu consumé lui aussi.

20 ans ont réellement passé et les fans autant du diptyque que du cinéaste trépignaient d’impatience quant à l’annonce d’une suite qui viendrait clôturer tout ça. Et Boyle et son scénariste ont prévu non pas un mais trois films pour finir en beauté. Vous en avez marre vous aussi des suites tardives qui ont beau ramener une partie de l’équipe d’origine, mais ne se foulent pas d’un iota pour proposer quelque chose de neuf ? À vrai dire nous aussi et c’est avec appréhension que nous sommes rentrés dans la salle pour découvrir "28 ans plus tard". Et c’est tout barbouillés que nous nous en sommes sortis. Le cinéaste britannique a ici poussé les curseurs de son cinéma à leur maximum, multipliant les axes de caméras, les ralentis (ou bullet time comme "Matrix" oui oui), les superpositions de fondus et même des images d’archives des grandes guerres, qui se sont glissées ici et là. Ceux que ça pouvait énerver déjà à l’époque, et par la suite plus généralement dans son cinéma, ne seront pas plus conquis par la démarche ici proposée. Pour les autres, c'est un voyage surprenant et déstabilisant qui les attend.

Au bord de la fin du monde, un jeune du nom de Spyke va suivre un parcours initiatique en apparence classique, mais les mises en situations et leur implication dans un tel environnement rendent le tout d'une noirceur peu banale pour un projet produit par Sony pour 75 millions de dollars. Pas peu fier de son interdiction aux moins de 16 ans, le film s’agite beaucoup, fait du bruit et brasse toutes les idées autant issues de la littérature que du monde du jeu vidéo (les zombies alpha, ceux qui se traînent…) dans un mashup qui pourrait paraître indigeste. Mais c’était sans compter sur une notion jusque-là absente de cette saga en devenir : l’émotion. Le parcours du jeune Spyke pour guérir sa mère touche à l’innocence contrastée à chaque instant par un monde qui normalement ne laisserait pas la place à ce genre d’initiative. La notion de transmission et de filiation (thème récurrent de la filmographie du bonhomme), finissent de nous achever en proposant un discours malin et peu conventionnel. Comment ferait un jeune enfant pour se former, s’accomplir, au milieu de ces terres dévastées ? Comment éviter de transmettre les cycles infernaux de l’humanité ? Le film propose à ses infectés d’évoluer.

Nous ne sommes plus en 2002, la peur n’est plus celle liée aux attentats de Londres ou du 11 Septembre. La peur, la vraie, c’est qu’il n’existe plus de but, plus d’insouciance malgré les horreurs. Et le film peut se vanter d’avoir les meilleures scènes de tensions de la saga (pour le moment), de ne pas oublier de se parer d’humour et de tendresse (le personnage brillamment joué par Ralph Fiennes en est le symbole ultime), mais surtout d’un regard acerbe sur la notion de mort dans nos sociétés. Soulignons également la bande originale signée par le groupe Young Fathers, qui a l’intelligence de créer sa propre sonorité, son propre thème destiné à devenir culte plutôt que de rejouer les partitions de John Murphy. Nous ne dévoilerons rien de précis dans ces lignes afin de conserver les multiples surprises du long métrage. On n'avait pas vu Danny Boyle autant en possession de ses moyens depuis longtemps. On a longuement hésité entre une bonne note et une très très bonne note, et comme cet objet filmique complètement barré continue à trotter dans nos esprits, qu’une larme a été versée et que le cauchemar était aussi répugnant que merveilleux, nous pouvons l’affirmer sans peur ni vergogne ; "28 ans plus tard" n’est très certainement pas la suite que vous attendiez, mais ça n’en reste pas moins un grand film.

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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