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DEAUVILLE ASIA 2009 - La corée du sud à l'honneur

Petit récit d’une success story

Après le Japon, c’était au tour de la Corée du Sud d’être à l’honneur dans le cadre du 11e Festival du film asiatique de Deauville. Il s’agit de toute évidence d’un coup à la fois résonnant et sans risques, vu l’ampleur et la qualité de la production cinématographique sud-coréenne depuis des décennies. Pourtant, la programmation a fait la part belle aux jeunes réalisateurs, qui présentaient pour certains leur premier long-métrage. L’occasion de faire le point sur ce cinéma, qui présente le paradoxe d’être à la fois plébiscité par un large public français et résolument singulier.

Le cinéma coréen occupe une place à part dans le paysage cinématographique asiatique. En effet, il suffit d’effectuer un petit sondage auprès de son entourage pour réaliser que de nombreux films coréens sont connus du grand public, au moins autant si ce n’est plus que les films japonais. Notamment, des réalisateurs comme Kim Ki-duk (révélé chez nous avec le magnifique “Printemps, été , automne, hiver.. et printemps” puis adopté avec “Les locataires”), Park Chan-wook (réalisateur de “Joint security area” et de la célèbre trilogie sur la vengeance “Sympathy for Mister Vengeance”, “Old Boy” et “Lady Vengeance”) ou encore Bong Joon-ho (“Memories of murder” et “The Host”, le plus gros succès sud-coréen de tous les temps) bénéficient d’une belle notoriété. Le cinéma sud-coréen véhicule par ailleurs une double image, celle d’un art puisant sa force et sa poésie dans sa culture populaire et celle d’un cinéma innovant, qui maîtrise bien les ficelles du divertissement.

Pourtant, la renommée du cinéma coréen n’est pas uniquement dûe au talent de ses bâtisseurs. En 1985, le gouvernement sud-coréen établissait un système de quotas unique au monde, qui contraignait les salles à projeter un film sud-coréen au moins 40% de l’année. L’objectif d’un tel dispositif était de protéger le cinéma national de l’emprise des productions américaines, et d’établir ainsi les conditions favorables à l’éclosion d’un cinéma sud-coréen de qualité. Par ailleurs, la fin de la dictature et la déréglementation ont permis après 1988 une plus grande liberté de création et de production. C’est à cette période qu’ont commencé à proliférer les sociétés de production indépendantes. Quelques années plus tard naissait la Nouvelle Vague coréenne, portée par un groupe de jeunes réalisateurs sud-coréens, qui se tournèrent vers les films de genre afin de dresser de façon détournée le portrait d’une société en pleine mutation.

Un succès croissant en salles et dans les festivals

Aujourd’hui, malgré la remise en cause des quotas, le paysage cinématographique sud-coréen se caractérise par sa productivité et, surtout, sa grande diversité. D’un côté par sa dimension d’auteur, avec notamment les films de Hong Sang-soo, inspirés du cinéma d’Eric Rhomer (le récent diptyque “Woman on the beach” et “Night and Day” en est le parfait exemple) ou ceux de Im Sang-soo, dont le magnifique “Une femme coréenne” fut consacré par le festival du film asiatique de Deauville en 2004. D’un autre côté par sa capacité à rallier à la fois le grand public et les amoureux du cinéma de genre, avec des films qui connaissent un franc succès international (“Old Boy” de Park Chan-wook ou “Memories of murders” de Bong Joon-ho pour ne citer qu’eux).

Au-delà des grands noms, la France (décidément conquise) ouvre aussi ses salles à plusieurs cinéastes inconnus, que des festivals comme celui de Deauville ou même de Cannes, Berlin et Venise contribuent à introduire dans le circuit. C’est le cas de Lee Yoon-Ki, gagnant du prix du jury au Deauville asiatique en 2005 avec “This charming girl”, Lee Jun-Ik, qui remporta le même prix l’année suivante avec “Le roi et le clown” et Jeon Soo-Il, Lotus du meilleur film en 2007 avec sa magnifique “Petite fille de la terre noire”. Un chapelet de succès pour le cinéma sud-coréen, que la récente consécration de “Breathless” et “The Chaser”, qui sont tous deux des premier long-métrages, vient à nouveau étoffer.

Grâce à la politique culturelle qui a marqué la Corée du Sud à la fin des années 1980, mais aussi grâce à l’engagement de nombreux cinéastes et à leurs choix artistiques (comme celui de revisiter le film de genre plutôt que de foncer tête baissée dans le pathos), le cinéma sud-coréen s’est frayé un véritable chemin par delà ses frontières géographiques, dépassant même les clichés d’un cinéma asiatique parfois trop hermétique. Il a aussi su donner à voir au monde entier les facettes d’une société renaissante, peu connue du grand public jusqu’à il y a 20 ans, et qui semble avoir trouvé dans le 7e art le moyen le plus juste et le plus beau de s’affirmer.Quelques exemples récents:

Le roi et le clown
The host
Old Boy
Lady Vengeance
Memories of murder
Woman on the beach
Adresse inconnue
L'arc
Souffle
Time
Printemps été automne hiver et printemps

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Sylvia Grandgirard Envoyer un message au rédacteur