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LE VENT SE LÈVE

Un film de Ken Loach

La palme politique de Ken Loach

En 1920, Damien (Cillian Murphy) choisit, après quelques hésitations, par s’engager auprès de son frère Teddy (Padraic Delaney), dans l’armée de volontaires, luttant pour l’indépendance de l’Irlande…

Après quelques années d'absence, et après avoir surtout reçu toutes sortes de prix (Prix du Jury pour "Raining stones", Prix du scénario pour "Sweet Sixteen", Prix d'interprétation masculine pour Peter Mullan dans "My name is Joe"), Ken Loach est reparti triomphant cette année de Cannes , avec la Palme d'or. Si on voit tout de suite ce qui a intéressé le réalisateur anglais dans cette histoire traitant de soulèvements en Irlande au début du XXème siècle, on y retrouve l'intelligence de son scénariste, Paul Laverty, qui mêle la petite histoire à la grande, avec ce portrait croisés de deux frères, voués à devenir ennemis.

C'est surtout dans leurs choix d'engagement, et leurs perceptions différentes de la justice et de l'intégrité qu'il faut chercher matière à émotion. Le personnage interprété par Cillian Murphy se retrouve forcé de commettre l’impensable (ici abattre un homme, voire un ami), au nom d’une cause qu’il espère valable. Mais certaines personnes abandonnent peut être trop facilement les utopies généreuses aux intérêts marchands. Et c'est à une série de choix, humains, comme politiques et sociaux, que le scénario confrontent ses deux personnages principaux.

Faite de réalisme et donc de trahisons, la victoire prend forcément un goût amer dans "Le vent se lève", contraignant les plus ambitieux à faire le deuil de leur illusions. Le réalisateur anglais revient ainsi à des thèmes similaires à ceux qui faisaient la puissance de son chef d'oeuvre, « Land and freedom ». Ce film, traitant de la guerre civile en Espagne, s’avérait cependant beaucoup plus émouvant, peut être simplement du fait du développement plus abouti d’une histoire d’amour parallèle, et d’un retour de bâton encore plus violent…

Ici, on regrettera la quasi inexistence du personnage féminin. On lui opposera l'interprétation, toute en rébellion sourde, de Cillian Murphy (« 28 jours plus tard »), dont la douleur des décisions se lit sur son visage. Face à lui, Padraic Delaney compose un frère aîné à l'allure et au physique pleins d'aplombs, à qui les concessions coûtent bien plus qu'il ne le montre. Tous deux sont le coeur de ce film champêtre et politique, à la sublime photographie, dans lequel malheureusement, Ken Loach ne peut s’empêcher de nous épargner les passionnants mais trop longs échanges politiques, que l'on pouvait déjà reprocher à "Land and freedom". Une belle palme pour un réalisateur qui creuse vaillamment son sillon.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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