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THE SQUARE

Un film de Ruben Östlund

Un brûlot mordant sur la lâcheté ordinaire et l'incapacité de communiquer

Un conservateur de musée d’art contemporain tentant de monter une nouvelle exposition basée sur l’altruisme et la confiance en l’autre, est victime d’une arnaque durant laquelle on lui dérobe son téléphone portable. Réussissant à localiser ce dernier dans un immeuble particulier, il décide de se venger et dépose dans toutes les boites aux lettres un message de menace, enjoignant les voleurs de lui rendre son bien. Mais ceci ne sera pas sans conséquences…

Palme d’or au dernier Festival de Cannes, "The Square" est finalement une œuvre aussi intrigante sur le papier que dans son processus narratif. Sixième long métrage du réalisateur suédois, remarqué à la Quinzaine des réalisateurs en 2011 avec "Play", puis célébré à Un certain regard en 2014 pour "Snow Therapy", le film dispose d'un scénario d'une richesse impressionnante, à la fois cynique et intelligent. Bousculant le spectateur, forcément amené à se positionner par rapport aux agissements du personnage principal (qui se lance dans une croisade honteuse pour retrouver son téléphone portable), le film regorge de bonnes idées, souvent provocatrices.

Au-delà du comique de répétition lié à la nature (ou l'arnaque) de l'art contemporain (une œuvre intitulé « You are nothing » avec une salle remplie de tas de poussière revient régulièrement à l’image), ce sont les pistes explorées qui étonnent en permanence, convoquant une nouvelle fois la lâcheté ordinaire, l'individualisme ou l'incapacité à créer de vraies relations avec les autres. Rapports aux SDF, aspects infantilisants ou paranoïaques des relations entre adultes, quête du buzz aux dépens de la dignité humaine, le film fustige l’ère de la communication médiatique et du happening, qui prend le dessus sur le contact humain.

Réussite formelle autant que conceptuelle, "The Square" pousse le bouchon très loin, s'en prend aux pros du marketing, au politiquement correct, à l'absence de dialogue, le tout dans une esthétique qui traduit bien la contradiction entre l'aspect lisse des vies et le discours affiché. Comédie noire et contemporaine, source de malaise comme de jubilation ponctuelle, cette Palme d’or n’en a certainement pas fini de faire couler de l’encre et devrait sans difficulté devenir un film culte.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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