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ROOM

Un film de Lenny Abrahamson

Une relation fusionnelle mère-fils captivante et attendrissante

Ma est retenue prisonnière dans une chambre avec son fils depuis plusieurs années. Chaque jour, elle cherche une solution pour pouvoir s’en échapper. Mais l’espoir est très mince…

Trois mètres par trois mètres. Ce sont à peu près les dimensions de la pièce dans laquelle Ma et son fils Jack sont séquestrés depuis plusieurs années. Elle était une adolescente pleine de vie, cheerleader à ses heures perdues. Elle fut kidnappée alors qu’un avenir prometteur s’ouvrait à elle. Lui est né dans les murs froids de cette prison au fond d’un jardin, ne connaissant du monde extérieur que le ciel qu’il entrevoit à travers un velux et les images transmises par la lucarne de la petite télévision trônant dans la pièce. Film coup de poing et coup de cœur, "Room" surprend dans un premier temps par son ton rafraîchissant avec lequel il s’empare d’une intrigue éminemment déchirante. Voir ce petit bout d’chou s’extasier de tout et de rien, s’adresser à « Madame La Chaise » et « Monsieur Le Lavabo », comme s’ils étaient des personnes, a quelque chose de profondément touchant et risible.

Le film est à l’image de cet antagonisme, un halo de joie dans un monde d’une noirceur terrible, une bulle protectrice où une mère se démène pour donner à sa progéniture une éducation la plus « normale » possible. Mais les contours de cette armure sont poreux, et la dure réalité revient brutalement et épisodiquement dans leur quotidien, coïncidant souvent avec les venues du vieux Nick, le bourreau et père de l’enfant. Bouleversant et haletant, ce drame empruntant des codes au thriller impressionne par sa propension à saisir des gestes anodins pour leur donner une signification bien plus profonde. Là où beaucoup aurait sombré dans le misérabilisme latent, Lenny Abrahamson ("Frank", "Garage", "What Richard did") préfère construire son récit à hauteur d’un petit gars de cinq ans, avec sa naïveté et sa joie de vivre inhérents à l’âge.

Si la deuxième partie est plus démonstrative en se transformant en une tragédie classique, le métrage garde son énergie positive, s’affirmant au fil des minutes comme une ode à la vie emplie d’espoir. Rapidement, la question ne tourne pas autour de savoir si les deux protagonistes vont réussir à s’échapper, mais plutôt comment on peut continuer à vivre et surmonter une telle épreuve. Et la réussite de "Room" doit alors beaucoup à son duo de comédiens. Brie Larson, déjà impressionnante dans "States of Grace", poursuit son ascension et remporte un Oscar largement mérité.

Cependant, la véritable vedette est quelqu’un d’autre, haute comme un tabouret et pourtant tellement charismatique : Jacob Tremblay. Celui qui n’a cessé de séduire l’Amérique durant la campagne promotionnelle dégage une aura rare, celle où chaque expression sortant de sa bouche sonne comme authentique. Sobre et pudique, ce récit à la complexité invisible est une œuvre poignante ayant réussi à dépasser le sordide de son postulat pour l’élever en une chronique parentale universelle. On en ressort les trippes secouées, les yeux humides et le cœur chaviré.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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