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PRÉJUDICE

Un film de Antoine Cuypers

Un huis clos familial intense et troublant

Dans une grande maison bourgeoise se prépare un dîner familial improvisé. Caroline, la fille des propriétaires a une grande nouvelle a annoncer : elle est enceinte et veut célébrer ça en famille. Son frère aîné, débordé, n’arrivera que tard dans la soirée. Son autre frère Cédric, lui est présent, mais sa présence semble déranger…

Une belle soirée d’été s’annonce. Le père prépare le barbecue, le gendre a apporté de bonnes bouteilles, la mère s’affaire en cuisine aidée par sa fille et sa belle-fille, alors que le petit-fils s’amuse à chercher du bois. Tout le monde semble ravi de se retrouver quand, sur la terrasse, apparaît Cédric, le fils certes adulte mais qui vit toujours à la maison. Instantanément le malaise s’installe, chacun l’accueille avec gêne et méfiance en tentant d’être naturel. De son côté, le jeune homme, timide et introverti, semble paniqué par la présence de sa soeur et de sa belle-soeur.

Ce trouble perceptible s’amplifie à l’approche du dîner où chacun va devoir se faire face autour du cadre exigu d’une table de jardin. Focalisant lentement sur chaque visage, la caméra révèle progressivement l’angoisse qui s’installe entre le fils et le reste de la famille. La tension monte, ponctuée d’une musique qui tire nerveusement sur les cordes d’un violoncelle prêtes à rompre. Cette atmosphère sur le fil du rasoir engendre un douloureux procès dont on ignore le crime. Tour à tour, notre point de vue oscille afin de déterminer qui est(sont) le(s) vrai(s) coupable(s). Entre fausses pistes et scènes inconfortables, le réalisateur entretient le malaise avec maîtrise et élégance. Une mise en scène subtile qui joue de l’ambiguïté des ses personnages sans jamais durcir le trait.

Pièce charnière de cette introspection douloureuse, le personnage de Cédric, est une matière instable qui menace d’exploser à tout moment. Un rôle à fleur de peau admirablement interprété par Thomas Blanchard qui semble presque possédé par cette performance de changements d’états anarchiques. Les mouvements de caméra qui l’accompagnent suivent le même processus tout en gardant cette étrange retenue qui fait tout le charme du film. L’homme disparaît, apparaît, volatile. Un état atmosphérique habilement maîtrisé qui fait du premier film d’Antoine Cuypers une oeuvre à part, puissante et stylé.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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