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JOHN WICK

Fallait pas buter le chien !

Depuis la mort de sa femme bien-aimée, John Wick passe ses journées à retaper sa Ford Mustang de 1969, avec pour seule compagnie sa chienne Daisy. Il mène une vie sans histoire, jusqu’à ce qu’un malfrat sadique nommé Iosef remarque sa voiture. John refuse de la lui vendre. Iosef n’acceptant pas qu’on lui résiste, il s’introduit chez John avec deux complices pour voler la Mustang et tuer sauvagement Daisy. Sans plus tarder, John apprend qu’Iosef est le fils unique d’un grand patron de la pègre, Viggo Tarasof. La rumeur se répand rapidement dans le milieu : tandis que le légendaire tueur cherche Iosef, sa tête est mise à prix par Viggo…

Depuis plusieurs années, à chaque fois que Keanu Reeves pointe son nez dans un film d’action, on sait désormais à quoi s’attendre. L’acteur de "Point Break" et de "Speed" ayant laissé sa sensibilité d’acteur investi au vestiaire depuis ses égarements philosophico-spirituels dans la trilogie "Matrix", il se contente désormais du minimum syndical sur le domaine du jeu. Le voilà donc qui prolonge sa chute libre, laissant toute notion de charisme prendre la poussière comme un vieux costard usité et limitant son jeu à deux expressions faciales (« je suis immobile pour avoir l’air réfléchi » ou « je me la joue ténébreux parce que je suis en colère » ?) qu’il prend soin de nous ressortir à chaque scène. Même si "John Wick" applique à nouveau la règle, force est de constater que l’ami Keanu est impeccable tant qu’il n’essaie pas de se la jouer torturé et/ou dramatique (quand il tente de le faire, c’est juste à hurler de rire). Et comme dans "Matrix Reloaded", le voilà qui joue le rôle d’un type indestructible qui semble presque traverser le film en touriste vu qu’il ne lui arrive quasiment rien.

On a affaire une fois de plus à une histoire de tueur en série qui déchaîne sa vengeance sadique contre ceux qui lui ont causé du tort. Ce qui se traduit donc par le fait de briser une trentaine de tibias à la minute, de jouer du salto pour expédier les vilains dans toutes sortes de surfaces, ou de flinguer tout ce qui bouge dans de grandes envolées chorégraphiques dignes d’un ballet du Bolchoï. Dans l’idée, pas de souci de ce côté-là : depuis les nanars de papy Bronson jusqu’aux flinguages sadiques de Liam Neeson en passant par les moulinets dans le vide de Steven Seagal, on est pleinement rodé au genre. On sait donc que notre interactivité de spectateur va rester au niveau passif, nous contraignant à passer 1h40 à se demander où et comment le type de la scène d’avant va se faire buter par le héros. Sauf que le scénariste (un inconnu total, précisons-le) en a profité pour y rajouter une histoire à deux balles dont le postulat de départ donne juste envie de rire.

Pour faire simple, John Wick est un ancien tueur qui a trois amours : sa femme, son chien et sa caisse. Or, quand la première vient tout juste de mourir, et qu’un abruti de jeune truand russe (comprenez : un gars en capuche et mal rasé qui écoute du rock de supérette à fond dans sa bagnole) ose massacrer le second et voler la troisième, c’est la goutte de trop. Surtout la mort du chien, qui devient ici l’élément déclencheur de la vengeance. On avouera que voir Keanu jouer les Charles Bronson sous Red Bull pour un tel motif est à deux doigts du risible, de même que le scénario n’offre rien d’autre à déguster comme ingrédients délirants. Il faut juste se contenter de quelques scènes d’action chorégraphiées avec un certain soin (celle du night-club inondé de techno et de néons vaut le détour) et de quelques pointures du coin venues jouer les seconds rôles purement décoratifs afin de payer leurs biscottes (on ne voit que ça pour justifier la présence de Willem Dafoe, de Ian McShane ou de John Leguizamo).

D’ordinaire, on aurait pu se limiter à considérer que cela devrait suffire à faire le bonheur du public si celui-ci n’est pas trop regardant, mais non. Là, pour le coup, et au vu des critiques assez élogieuses en provenance des États-Unis, on avait placé beaucoup plus haut le niveau d’exigence pour un éventuel come-back de Keanu Reeves, et le résultat ne convainc pas. Le succès de "John Wick" au box-office américain aura beau permettre à l’acteur de retrouver un minimum d’intérêt aux yeux des studios qui lui faisaient la gueule jusque-là (en même temps, après autant d’échecs commerciaux, c’était tout à fait logique), pas sûr que le retour en grâce soit de longue durée…

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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