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EASTERN BOYS

Un film de Robin Campillo

Les variations de l’amour

Gare de l’Est, une bande de garçons déambulent. Originaires de Russie, d’Ukraine ou de Roumanie, ils éveillent les soupçons des vigiles et des voyageurs. L’un d’entre eux, Marek, s’éloigne du reste de la bande et se fait aborder par Daniel, qui lui propose de le suivre pour 50 euros. Le garçon accepte et propose de le retrouver chez lui le lendemain à 18h…

Dans le décor impersonnel d’un quai de gare, deux hommes se croisent. Alors que tout les oppose (l’âge, l’argent et leurs papiers…), ils vont échanger sur un instinct primaire universel : le sexe. L’homme établi prend naturellement l’ascendant sur le clandestin en lui proposant de se prostituer comme si cela était évident. De cette rencontre, naitra une relation singulière et pour le moins inattendue. Scindée en quatre chapitres, cette liaison connaitra plusieurs phases, chacune variante d’un seul et même sentiment : l’amour.

Élégant et posé, "Eastern Boys" séduit par ses contrepieds scénaristiques. Les réactions des personnages, dans les premiers chapitres, ne sont pas forcément celles qu’on attend. Cela donne au film une dimension presque surréaliste tout en étant parfaitement ancré dans la réalité. Parfois intimistes, parfois frénétiques, les tableaux se succèdent ponctués de très belles scènes hypnotiques, à l’image de cette fête imposée à Daniel dans son propre appartement, ou celle des feux du 14 juillet, plongeant Marek dans le souvenir douloureux des bombardements qu’il connu enfant. Pour souligner au mieux cette ambiance toute particulière, Robin Campillo habille son film de la très belle musique d’Arnaud Rebotini, percutante et enivrante, d’un style proche de celui de René Aubry.

Malgré quelques longueurs dans la seconde partie, où le couple doit faire face au chantage de l’odieux « Boss » (une crapule notoire qui profite de la précarité des eastern boys pour mener à bien ses affaires aussi juteuses qu’illicites), le film séduit par sa ligne de conduite atypique qui emmène nos deux personnages vers un final surprenant. Le jeu sobre et énigmatique d’Olivier Rabourdin offre une belle répartie à celui du jeune Kirill Emelyanov, touchant de sincérité dans son rôle d’adolescent en transit entre deux mondes. Loin d’être passionnelle ou empathique, cette histoire d’amour à quatre temps montre que les inégalités peuvent parfois s’estomper au profit de la simple humanité, avec ses atouts et ses faiblesses. Un angle de vue, somme toute, plutôt audacieux et rarement vu à l’écran.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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