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DOCTEUR FRANKENSTEIN

Un film de Paul McGuigan

Un monstre à monter soi-même

Le scientifique Victor Frankenstein rencontre un clown lors d’une soirée au cirque. Un clown doté de connaissances avancées quant au corps humain et à son fonctionnement. C’est pourquoi il décide d’en faire son associé dans la quête qu’il mène pour créer la vie… à partir de la mort…

Initialement confié à Shawn Levy ("Treize à la douzaine", "Les Stagiaires", "Crazy Night"…), le projet "Docteur Frankenstein" a finalement atterri entre les mains de Paul McGuigan, un réalisateur « faiseur » d’Hollywood ayant participé à quelques séries à succès comme "Scandal" ou "Sherlock". On retrouve d’ailleurs quelques acteurs de la série dans le film : Mark Gatiss (Mycroft Holmes), Andrew Scott (James Moriarty) ou encore Louise Brealey (Molly Hooper).

Contrairement au livre de Mary Shelley, le film ne se focalise pas uniquement sur Victor Frankenstein. En effet, c’est Igor Strausman, le personnage interprété par Daniel Radcliffe, qui tient le rôle de narrateur. Ainsi, McGuigan explore davantage la relation entre l’assistant et le savant fou que celle que ce dernier entretient avec sa créature. Mais le vrai point fort du film repose plutôt sur l’enquêteur Roderick Turpin (Andrew Scott). Ce dernier, le principal antagoniste du héros du film, est obsédé par Frankenstein et ses expériences. Cette obsession est entretenue par sa foi chrétienne qui s’oppose violement au complexe de Dieu qui pousse Frankenstein à vouloir recréer la vie à partir de morceaux de corps morts. James McAvoy interprète d’ailleurs assez bien ce mélange de génie et de folie qui compose le personnage.

L’affrontement entre le savant fou et l’enquêteur constitue un deuxième niveau de lecture des plus intéressants. Les deux personnages symbolisent l’opposition manichéenne entre science et religion telle qu’elle est abordée dans l’art et la philosophie depuis l’Antiquité. Le point de vue scientiste de Frankenstein convaincra les athées ayant foi dans la science et le progrès alors que les croyants se reconnaîtront sans doute davantage dans la répulsion qu’éprouve Turpin pour ces expérimentations qui, il faut bien l’admettre, semblent n’être qu’une sorte de croisade aveugle menée par le savant contre la mort. Entre ces deux camps, Igor (Daniel Radcliffe) tient en quelque sorte le rôle de l’agnostique, convaincu que le progrès scientifique et technologique est globalement bénéfique, mais également assailli par le doute face à une démarche qu’il ne peut soutenir tant elle repousse les limites de ce qui était admissible en 1860, époque à laquelle se déroule l’histoire. D’un point de vue plus contemporain, "Docteur Frankenstein" nous renvoie à nos questionnements bioéthiques, débat sans fin qui divise la société depuis plusieurs décennies.

Visuellement, la première partie du film est assez réussie. Composé de ralentis, de quelques effets de lumière, le résultat n’est pas sans rappeler le "Sherlock Holmes" de Guy Ritchie. Mais cet aspect mis à part, la mise en scène manque un peu d’inventivité. Un manque d’idée qui se ressent particulièrement durant la dernière séquence où McGuigan use et abuse du shaky cam, rendant l’action plutôt désagréable à suivre. Au final, "Docteur Frankenstein" est un vrai divertissement hollywoodien comportant également un questionnement assez intéressant, même si le problème n’est pas abordé avec la profondeur qu’il mérite.

Adrien VerotEnvoyer un message au rédacteur

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