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COLORFUL

Un film de Keiichi Hara

Un touchant optimisme

Une âme reçoit une seconde chance, lui permettant à terme de retrouver le cours de son cycle de réincarnation. Elle se voit assigné un corps, celui d’un adolescent dénommé Makoto, qui vient tout juste de se suicider en avalant des médicaments. Elle se réveille à l’hôpital, entourée de ceux qui sont sensés être ses parents et de son grand frère et devra endurer la vie de ce jeune homme mal dans sa peau, pendant au moins 6 mois. Pour cela, elle est aidée ponctuellement par un certain Pura Pura, sorte d’ange pas vraiment sympathique…

Le réalisateur de « Un été avec Coo » réalise une adaptation sensible de l’œuvre de la romancière Eto Mori, parue en 1998. Son livre avait déjà fait l'objet au Japon, dès 1999, d'une série télé d'animation de 16 épisodes de 7 minutes, puis d'un film « live » en 2000. Voici donc que Keiichi Hara s'empare de ce récit, en faisant un conte cruel du quotidien. Car hormis les apparitions de Pura Pura, gamin devenu guide céleste, et la scène d'ouverture en « caméra » subjective, arrivée d'une âme silencieuse aux guichets du Paradis, sorte de salle d'attente grisâtre où défilent des silhouettes fantomatiques, le réalisme est de mise. Et pour cette histoire qui conte principalement le banal quotidien d'un ado, le réalisateur tenait au moindre détail.

Le récit n'est pas des plus complexes. Il s'agit d'une double quête : celle d'un esprit, qui pris au piège d'un corps qui n'est pas le sien, tente de comprendre ce qui a poussé à bout le garçon dont il occupe l'enveloppe charnelle ; et celle d'une âme tourmentée, qui n'a pas envie d'être là et se demande ce qu'elle a pu faire dans sa vie passée pour mériter cette punition. Mal à l'aise, incapable initialement de s'intéresser à cet « autre », il va lui falloir éviter les erreurs (il ne connaît rien de la vie du garçon, de ses amis, des lieux qu'il fréquentait, de la peinture qu'il pratiquait...). Il va aussi lui falloir composer avec les autres, ceux qui entourent Makoto, en choisissant de se taire, de fuir (il sort souvent de table sans manger), ou de dialoguer, de se comporter avec respect, ou de se montrer blessant (il mène la vie dure à ses parents).

C'est donc à tous les travers d'un adolescent qui se cherche que ce personnage se trouve confronté. Direct et butté, sans concession aucune, en proie à des accès de colère excessifs, troublé par la beauté de certaines jeunes filles, agacé par la maladresse d'autres, il va lui falloir trouver sa place, sans exclure ou se sentir exclus. Cette jolie fable n'a au passage pas peur de traiter des thèmes difficiles, comme l'adultère ou la prostitution, et finit par trouver une certaine résonance. Récompensé par le prix du public et par une mention spéciale au Festival du film d'animation d'Annecy 2011, « Colorful » est un film doux-amer, qui en accompagnant un jeune en devenir, fait montre au final d'un certain optimisme.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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