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AU CUL DU LOUP

Un film de Pierre Duculot

Un voyage pas très attractif

Christina s’est enlisée dans une routine pesante, la monotonie rythmant sa vie. Mais lorsque sa grand-mère lui lègue une maison en Corse, la jeune Belge y voit une raison de transformer son quotidien. En désaccord avec sa famille, elle décide alors de partir seule pour les terres corses.

Pour son premier long métrage, Pierre Duculot a choisi de cibler son action en Corse, afin de rendre hommage à ces petits villages pittoresques qu’abrite l’île et pour lesquels il éprouve tant d’affection. Sa vision de la Corse n’est donc pas celle d’un ilot paradisiaque mais plutôt celle d’un lieu de perdition des traditions, des fuites de la jeunesse, d’un reniement du passé. A contrario, Charleroi, souvent qualifiée de ville laide, est filmée de manière plus attrayante, dans une ambiance chaleureuse, les couleurs magnifiant la région. C’est dans ce réel que le metteur en scène a voulu plonger l’action, refusant les a priori et les portraits « cartes postales ».

Toutefois, si le réalisateur sait utiliser sa connaissance de ces paysages pour qu’ils épousent parfaitement sa caméra, ce dernier pêche dans la relation qu’entretient sa protagoniste avec le reste du monde. Son épopée lorgne un effet plus du côté du voyage initiatique que de la simple balade de vacances. En quête d’elle-même, Christina s’obstine à remettre en état la vielle bâtisse dont elle a hérité, métaphore de sa propre condition. Au fur et à mesure que les travaux avancent, elle s’épanouit à nouveau, se retrouve et apprend à renier son quotidien et sa monotonie. Malheureusement, le feu a du mal à prendre et le spectateur parvient difficilement à comprendre les agissements de la jeune femme, et surtout à s’intéresser à ceux-ci. Le manque de psychologie des personnages est caractéristique de ce métrage, ce qui donne l’impression d’une coquille vide, d’une vague mascarade sans grand intérêt. La romance entre Christina et un berger corse finit d’entacher définitivement la qualité de l’ensemble, tant celle-ci manque de passion et de cohérence. On aimerait s’intéresser aux péripéties que traversent les personnages, mais la platitude dans lesquelles elles se déroulent empêche toute empathie de la part du spectateur, le rythme ultra-lent n’arrangeant pas les choses.

Si le réalisateur n’est pas maladroit avec une caméra dans les mains, notamment lorsqu’il se contente de filmer la nature, on regrettera également la manière dont il essaye de la lier avec ses personnages. Il est, en effet, bien difficile de parvenir au mysticisme qu’il recherche en vain, notamment dans les différents symboles qu’il tente de créer. N’est pas Bruno Dumont qui veut ! De plus, les retournements amoureux, censés enivrer le spectateur et animer la pellicule, ne sont pas loin du ridicule et ajoutent une dernière ombre au tableau. Ainsi, le voyage tourne court et la quête de la jeune femme s’effondre presque instantanément. Le spectateur, lui, n’y trouvera certainement qu’une bonne sieste…

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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