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ANTICHRIST

Un film de Lars Von Trier

Une aventure intérieure effroyable et déroutante

Un couple venant de perdre leur enfant traverse une crise. La femme, extrêmement fragilisée, est suivie de près par son mari, psychologue de profession. Pour l’aider à surmonter cette douloureuse épreuve, il l’emmène à l’Eden, une cabane en pleine forêt où ils avaient l’habitude de se réfugier. Or cette immersion dans la nature a des conséquences inattendues sur les deux individus...

Véritable bombe à retardement, ce film a soulevé une tempête lors de sa projection au 62e Festival de Cannes. Si beaucoup ont crié au scandale et à la provocation, “Antichrist” n’en demeure pas moins une oeuvre aboutie, passionnelle, qui marque une véritable étape dans la carrière du réalisateur danois le plus aimé et le plus détesté de ce siècle.

A travers une construction en huis-clos, où les personnages s’isolent du monde dans le but de soigner leur maux, Lars Von Triers explore le monde de la dépression avec un réalisme effroyable. Ayant lui-même vécu cette terrible expérience, il en décrit chaque étape avec une précision clinique, complexifiant le récit en introduisant une ambiguïté mari / femme et psy / patiente. Cette ambiguïté s’avère d’autant plus obsédante qu’elle est incarnée par Charlotte Gainsbourg et Willem Dafoe, impeccables tous les deux en couple à la fois fusionnel et étrangement froid.

Très vite, le film prend des allures de thriller fantastique. Au contact de la forêt, qui constitue un personnage à part entière, les rêves les plus flous trouvent un écho dans la réalité et les secrets les plus sombres sortent de terre, donnant aux personnages une dimension mystique inattendue. Il en découle des scènes d’une violence inouïe dont on pourrait reprocher le réalisme (âmes sensibles s’abstenir), mais qui permet au scénario d’emprunter un chemin décisif et d’accompagner la montée en puissance des personnages.

“Antichrist” est donc une véritable expérience cinématographique, un film dévastateur dont la portée psychologique n’a d’égale que sa puissance visuelle. Parce que si Lars Von Triers fait dans l’analytique en s’obstinant à creuser le champs des croyances humaines, il n’en demeure pas moins un esthète, véritable génie dans l’art de mettre en scène la passion et les contradictions de l’homme. Le prologue du film, véritable chef d’oeuvre de lyrisme cinématographique, est une parfaite démonstration de ce talent.

Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur

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